Une pression qui se fait sentir tous les jours; se reposer, c’est s’enliser. Dans un contexte d’évolutions effrénées, où seul compte le succès, l’échec est inenvisageable. Pourtant, nombreux sont ceux qui semblent dépassés par cette frénésie. En 2017, 4709 entreprises en Suisse on fait faillite, un record. Ce chiffre fait pourtant pâle figure face aux 43 000 entreprises créées la même année!

Les fluctuations s’accentuent en même temps que les cycles des produits se raccourcissent, les besoins changent plus rapidement et si l’on ne parvient pas à innover au même rythme, on a vite fait d’être éjecté de la course. Et la numérisation ne fait qu’accélérer la dynamique.

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Perdre fait partie du jeu. Les évolutions dans le paysage des entreprises ont toujours existé: preuve en est le rapport entre les créations et les faillites qui est relativement constant. L’économie s’est toujours nourrie du changement, la nôtre tout particulièrement. L’habillement, le textile? Des industries jadis très importantes en Suisse se cantonnent aujourd’hui à des niches, ou ont disparu depuis longtemps. Papier, cellulose, acier, des pans entiers de l’économie malmenés par la mondialisation ont dû se réinventer ou relocaliser leur production.

Pour réussir, il est aussi bon de savoir ce qu’il ne faut pas faire.

Sur le plan international, la taille des acteurs permet des économies d’échelle et nos producteurs nationaux peinent à rivaliser. Beaucoup doivent jeter l’éponge. Le secteur des services lui aussi vit d’intenses bouleversements. Comme la finance, qui ne ressemble plus guère à ce qu’elle était il y a trente ans. Or malgré ces changements incessants, ou grâce à eux, la Suisse peut s’enorgueillir d’une base industrielle forte et d’un certain équilibre entre les secteurs. En termes de compétitivité, la Suisse est souvent en tête des classements.

L’échec est un élément constitutif de la concurrence, tout comme perdre fait partie du jeu. Trébucher, certes, mais aussi se relever pour recommencer, faire mieux. Alors, où est le problème? C’est que dans notre société, la notion d’échec a une connotation négative. Peu importe à quoi l’on échoue, ce sera toujours vu comme une défaite personnelle. La reconnaissance sociale, l’admiration sont réservées à ceux qui réussissent. Or ce que l’on oublie souvent, c’est que tout le monde ne peut pas réussir, car dans toute compétition il y a des gagnants et des perdants.

Aussi, au lieu de suivre un énième séminaire sur le succès entrepreneurial, ou de collectionner les modes d’emploi pour devenir Steve Jobs ou Elon Musk, les entrepreneurs feraient bien de réfléchir sur la notion d’échec. Car pour réussir, il est aussi bon de savoir ce qu’il ne faut pas faire.

MS
Martin Neff, Chef économiste de Raiffeisen Suisse