Quels changements avez-vous pu observer dans les attentes des salariés vis-à-vis du travail?

La pandémie a accéléré la mutation des ressources humaines. Si chaque collaborateur a des attentes spécifiques, d’un point de vue générique, il exige aujourd’hui l’avènement d’un nouveau contrat psychologique: davantage de transparence, de diversité et d’inclusion, d’intégrité managériale et de qualité de la chefferie, et plus d’équité salariale. Mais aussi davantage de souplesse et d’agilité organisationnelle (moins de contrôle et plus de coaching) et plus de responsabilité sociale, notamment en termes de durabilité.

Les salariés sont-ils vraiment devenus moins fidèles?

Non, ils sont devenus simplement plus exigeants. Leur niveau de formation s’est considérablement accru et l’entreprise ne peut plus leur garantir un emploi à vie. Il est donc normal que les candidats se déclarent responsables de leur portefeuille de compétences et qu’ils s’assurent que leur employeur contribuera à son développement. A défaut, ils désertent, non pas pour des raisons d’infidélité, mais pour leur survie professionnelle.

Les PME ont-elles anticipé ces nouvelles exigences?

Par leur taille, les PME sont souvent très agiles et peuvent avoir une capacité d’adaptation fulgurante. Elles sont aussi parfois prisonnières d’inertie ou d’un manque de moyens qui rendent leur gestion RH empirique ou intuitive.

Comment accompagnez-vous les entreprises dans ce contexte?

Il est maintenant admis qu’un simple service de paie n’est plus suffisant, même dans une PME. Elles souhaitent donc professionnaliser leur gestion RH au sens large, en travaillant sur l’image employeur, la formation, la gestion des conflits et les nouveaux modes d’organisation, mais aussi sur la prévention des risques psychosociaux.

3 CONSEILS POUR UN RECRUTEMENT EFFICACE
  1. De l’humanité et de l’élégance Le processus doit être cadré, clair, transparent et inscrit dans un calendrier raisonnable.
  2. Du professionnalisme et de la stratégie L’employeur doit connaître les techniques d’entretien, de décryptage des CV, de décodage des certificats de travail. A lui aussi de mobiliser des tests de personnalité pour être certain de se connecter à la vérité intime du candidat.
  3. De l’humilité et de l’écoute La manière dont le recrutement est mené dit beaucoup de la culture organisationnelle de l’entreprise. Ce «processus ambassadeur» devrait rendre honneur à l’ADN de l’organisation.

«Un simple service de paie n’est plus suffisant, même dans une PME.»

 

Les entreprises sous-estiment-elles l’importance de l’étape du recrutement?

Oui, et c’est pourtant un processus cardinal: engager un collaborateur, c’est changer le visage et le portefeuille de compétences de son organisation. Nous observons que les entretiens sont de véritables sketchs; la plupart du temps, le candidat ne sait pas qui il va rencontrer, et les questions posées sont souvent scolaires et sans pertinence. Quant aux décisions, elles sont souvent prises en mobilisant le réseau personnel ou sur la seule réputation du candidat. A l’inverse, il faut se méfier des quelques poètes de la profession RH qui persistent à croire que le test de Rorschach (la fameuse tache d’encre, ndlr) ou la grapho-astro-numérologie sont des instruments de recrutement adéquats…

Quelles sont les principales erreurs que vous constatez à ce stade?

Beaucoup d’entreprises estiment que publier une annonce dans le journal local suffira pour susciter de l’intérêt. Or recruter, c’est d’abord s’assurer de son degré d’attractivité vis-à-vis de ses propres collaborateurs; puis aller chercher les candidats où ils sont, c’est-à-dire sur les réseaux numériques. Je constate aussi une absence de préparation aux entretiens de la part des employeurs (et des candidats!). C’est pourtant une phase essentielle, de rencontre, d’investigation et de négociation. Enfin, il ne faut pas oublier que c’est un processus symétrique: le candidat recrute l’employeur autant que ce dernier recrute le candidat.

Marché du travail en mutation - infographie
© Sources:OFS/SECO/BCV/AVENA

Comment faire la différence pour convaincre un talent de rejoindre son entreprise?

Plusieurs points sont importants. A commencer par le respect du candidat en tant que personne. Il faut aussi lui donner des perspectives en tant que talent, en lui montrant que le poste convoité lui permettra de développer son employabilité. Il faut enfin indiquer au candidat qu’il sera considéré comme une force de proposition, et qu’il sera entendu et écouté.

Quelles sont les principales raisons pour lesquelles un salarié décide de partir?

Parce qu’il n’arrive pas à tisser un partenariat stratégique avec son responsable. Souvent, ce n’est pas l’entreprise que l’on quitte; on quitte une situation de mésentente avec son supérieur hiérarchique. Aussi parce que l’on a l’impression de ne pas progresser en termes de compétence et de responsabilité et, du coup, de subir une régression professionnelle. Enfin, parce que l’on ne se sent pas respecté en tant que personne. D’où l’importance de la régulation d’une équipe, de la formation des managers et de la prise en compte des obligations légales envers ses employés.

Quels conseils pouvez-vous donner aux PME qui n’ont pas de spécialiste RH?

D’abord, leur dire que ce n’est pas grave. Les tâches RH (recrutement, relève, paiement des salaires, prévoyance, gestion des conflits, formation, etc.) peuvent être assumées par plusieurs têtes, et le recours ponctuel à des compétences externes n’est pas prohibé. De façon générale, l’employeur doit être conscient des enjeux RH et favoriser des espaces d’échange au sein de l’entreprise afin de s’assurer que les mesures prises répondent aux attentes concrètes des salariés

5 LEVIERS POUR FIDÉLISER SES TALENTS
  1. Un cahier des charges clair, dans un contexte organisationnel transparent et sain.
  2. Un management exemplaire et engagé.
  3. Des perspectives en matière de développement de l’employabilité.
  4. Des conditions-cadres conformes aux prix du marché.
  5. Un processus RH de recrutement et d’intégration d’excellence.
Boîte à outils RH pour les dirigeants de PME et d’institutions:
  • Conduire un entretien de recrutement
  • Eviter de poser des questions inadéquates
  • Choisir une formation de management
  • Conduire une prise de référence professionnelle
  • Gérer les risques psychosociaux

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