On connaît la Suisse pour ses montres, ses chocolats, et bien sûr, pour ses banques. Son savoir-faire dans l’impression de billets bancaires est en revanche moins réputé. Or l’immense majorité des billets de banque dans le monde (90%) naissent grâce à la technologie helvétique, plus précisément grâce à celle de la société Koenig & Bauer Banknote Solutions, leader mondial de l'impression de billets de banque, dont l’installation à Lausanne remonte à 1952.

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Créé en 1817, le groupe allemand Koenig & Bauer est le plus ancien fabricant de presse d’impression au monde. En 1814, Friedrich Koenig imprime la première édition du Times à Londres. La saga helvétique des billets de banque commence il y a exactement 70 ans, lorsque l’Italien Gualtiero Giori, imprimeur et spécialiste en sécurité, installe son entreprise à Lausanne. De La Rue Giori est ensuite rachetée par K&B en 2001. Aujourd’hui, le groupe compte plus de 5000 collaborateurs, y compris 620 chargés de fabriquer les machines dédiées à l’impression de billets de banque sur quatre sites, dont 140 au siège lausannois.
 
160 milliards de billets

Koenig & Bauer, dont le chiffre d’affaires s’est élevé l’année dernière à 1,1 milliard de francs (réparti pour deux tiers dans le secteur de l'emballage et un tiers dans les billets de banque), croit dur comme ferme à l’avenir de ce moyen de paiement. Ceci alors même qu’il est considéré par un nombre croissant de personnes comme dépassé, en raison du développement des paiements mobiles, sans contacts et autres crypto-monnaies.

«Aujourd’hui, 160 milliards de billets sont imprimés chaque année dans le monde, avec une croissance annuelle de 2 à 3%, souligne Eric Boissonnas, CEO de K&B Banknote Solutions. Sans le cash, des pans entiers de la population seraient exclus de la société.» Il relève qu’en Allemagne, 72% des gens utilisent encore régulièrement ce moyen de paiement. Aux USA, un quart de la population ne dispose pas d’un compte bancaire, un chiffre qui s'élève à 1,6 milliard de personnes à travers la planète. Par ailleurs, des pays comme la Suède et l’Espagne édictent des lois pour favoriser le paiement par cash. Au total, 75% des paiements effectués de personne à personne à l'international le sont en argent liquide. 
 
Nombreux avantages

Le billet de banque permet donc d’intégrer à l’économie des millions de personnes ne disposant pas de compte bancaire ou ayant trop peu d’argent pour pouvoir bénéficier d’une carte de crédit. Parmi ses autres avantages, Eric Boissonnas cite l'anonymat et l’absence de frais lors des transactions. Et pour fidéliser les plus jeunes, l'entreprise - qui collabore étroitement avec Sicpa, société également établie à Lausanne leader dans les encres spéciales - développe des applications sécuritaires, voire ludiques. L’une d'entre elles permet de contrôler la validité d’un billet à l’aide d’un smartphone en moins d’une seconde et une autre de lire un message digital sur un billet par celui qui le détient. 

Et qu’en est-il des risques liés à la falsification? Pour Eric Boissonnas, ils demeurent limités. En effet, pour qu’une telle entreprise devienne rentable, il faudrait produire d’énormes quantités (l’équivalent d’un pays de 30 millions d’habitants) en raison des innombrables processus, du design et du matériel nécessaire. A titre d’exemple, le franc suisse, qui est le billet le plus cher (environ 400 francs sont nécessaires pour produire mille billets selon la BNS, contre près de huit fois moins pour l’euro), nécessite pas moins de douze procédés d’impression, contre huit à dix en moyenne pour les autres billets. Dès lors, les contrefaçons se cantonnent généralement à des situations très limitées, par exemple lorsqu’un client achète une boisson dans un bar à une heure avancée de la nuit.

William Türler
William Türler