C’est un peu comme prendre un ascenseur géant. Pour arriver au siège de Mecatis Engineering, il faut d’abord emprunter le téléphérique reliant Riddes à Isérables. Etablie depuis 2010 dans ce village valaisan, la PME ambitionne aujourd’hui de révolutionner l’industrie de la micromécanique.

Depuis deux ans, elle fabrique une petite fraiseuse extrêmement compacte, la Micro5. «Jusqu’à présent, les horlogers et les bijoutiers, par exemple, ont utilisé des machines surdimensionnées pour confectionner des pièces minuscules. La Micro5, parce qu’elle ne fait que cinq fois la taille de la pièce à usiner, rationalise tout le processus et permet d’augmenter les cadences de production», confie Samuel Vuadens, directeur de Mecatis.

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Moins énergivore qu’un sèche-cheveux!

Grâce à sa légèreté et à sa rigidité, elle est également capable de rester très précise lors d’usinage à grande vitesse. Elle est aussi très peu gourmande en énergie. «Aujourd’hui, la Micro5 consomme moins qu’un sèche-cheveux», expose Samuel Vuadens. Après avoir été développé par la Haute Ecole Arc de Neuchâtel, Mecatis a obtenu les licences de fabrication de la microfraiseuse en 2017. Cinq commandes pilotes ont été signées avec des entreprises horlogères de l’Arc jurassien. Dans cette région, quelque 2000 fraiseuses sont actuellement en activité. A terme, elles pourraient être remplacées par les petites fraiseuses de Mecatis. «Les manufactures horlogères sont actuellement notre principale cible, confirme Samuel Vuadens. Nous visons aussi la joaillerie et l’industrie des technologies médicales. Aujourd’hui, cela serait une erreur stratégique et technique d’acquérir des machines de plusieurs tonnes pour usiner des pièces de quelques grammes!»

Mais la Micro5 n’est pas seulement une nouvelle prouesse technique: elle a aussi été conçue pour opérer à l’heure du 4.0. Elle est donc connectée à une plateforme numérique, baptisée Factory5, également développée par Mecatis. Cette plateforme se veut une interface reliant différents partenaires de la chaîne de valeur industrielle et permettant de travailler avec d’autres fournisseurs de «smartmachines» ou de savoir-faire.

«La plateforme est lancée et tournera vraiment lorsque les machines seront arrivées en nombre sur le terrain. Notre but est donc de faire baisser au maximum le coût de production afin de les vendre très largement. De nombreuses entreprises pourront ainsi se l’approprier et développer des solutions logicielles complémentaires», explique Samuel Vuadens. Tout cet écosystème nouveau pourrait permettre aux industriels de concevoir des produits sur mesure pour leurs clients. Une vingtaine de partenaires ont déjà rejoint la plateforme.

Accompagnée de divers équipements, d’une armoire électrique et d’une zone d’automation, la Micro5 a la taille d’un frigo. Par leur petite taille, ces micromachines auraient le potentiel de changer profondément toute la chaîne de production de l’industrie microtechnique, en étendant le concept de micromachine à celui de micro-usine. Pour Samuel Vuadens, il s’agit «d’une première étape dans un changement complet de la manière de produire». Ici, plus question de seulement adapter la taille des machines à celle des pièces produites. Le but est d’imaginer un autre univers industriel où la taille des usines s’adapte à celle des machines. D’aucuns rêvent par exemple de pouvoir fabriquer une prothèse sur mesure à partir d’une IRM directement dans un hôpital.

«Nous sommes à l’orée de quelque chose de grand, assure Samuel Vuadens. C’est stressant et excitant à la fois.» Fondée en 2007 à Sion, Mecatis a d’abord été un intégrateur industriel, concevant, réalisant et montant des machines spécifiques pour diverses sociétés. En 2017, ses fondateurs ont saisi l’occasion de la Micro5 pour changer de dimension. «Après dix ans d’expérience en tant qu’intégrateurs, nous étions prêts à porter un produit très exigeant avec un fort potentiel de développement», souligne Samuel Vuadens. La société produit actuellement deux Micro5 par mois. Son objectif est de démocratiser cette nouvelle façon de produire qui tient compte de l’efficience et de la digitalisation.


Vendredi 7 juin 2019, Mecatis proposera une visite de ses ateliers dans le cadre des 30 ans de «PME Magazine». Inscription 

Martin Bernard
Martin Bernard