«Le jeu de mots est un peu facile mais le jour où je suis devenue juriste, je pensais que mon futur parcours professionnel filerait droit. Alors qu’ado je rêvais de devenir interprète aux Nations unies, photoreporter ou encore gemmologue, je m’étais préparée à passer une vie professionnelle dans un bureau, à faire partie d’une équipe et à porter avec fierté un badge estampillé au nom de l’entreprise internationale qui m’emploierait. Objectif atteint! D’abord en Allemagne, au sein d’une société de 2000 personnes, avant de passer dix ans dans une compagnie d’assurances, à cheval entre services juridique et du personnel. Puis j’ai été happée par L’Oréal Suisse, qui me proposait un poste de directrice du personnel et du recrutement.

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Pourquoi pas? J’ai adoré ces fonctions et tellement appris tout en taisant mon envie de liberté, qui sommeillait en moi depuis petite déjà. A cette époque, je ne soupçonnais pas que, de fil en aiguille, la cosmétique m’amènerait vers le luxe puis vers «mon» luxe à moi: voler de mes propres ailes et pouvoir en vivre.

J’ai tout de suite senti que ce nouveau métier, qui m’était pourtant peu connu, me correspondait. Etre proche de l’humain, percevoir le potentiel d’une personne, l’aider à son développement; je me sentais très à l’aise dans cette mission. L’humain a toujours guidé mes choix, dans tous mes postes et diverses formations aussi intéressantes que disparates: photographe, spécialiste en marketing, architecte d’intérieur ou cafetier-restaurateur en candidate libre (suivie pendant une période de chômage). Quelques mois à déambuler dans les rues de New York, appareil photo en bandoulière, n’ont pas été de trop pour mettre de l’ordre dans mes projets.

A mon retour, je décide de continuer dans ce secteur mais en me formant en vue d’être indépendante. D’abord auprès de l’agence Hays, où j’ai appris à pousser la porte des banquiers, puis à la Fnac Suisse, comme DRH. Malgré mon statut de salariée, j’ai partout géré mon engagement personnel comme si je le faisais pour ma propre entreprise. Nous étions en 2008, l’heure de me jeter dans le vide avait sonné! J’étais prête. Mauvaise pioche. Ou plutôt, mauvais timing. A peine avais-je pignon sur rue que la crise financière s’est invitée dans l’équation. Le bon moment pour se créer un réseau de candidats dans le secteur bancaire, mais le pire pour se construire un réseau de clients, qui licenciaient. Deux ans de grande solitude pendant lesquels j’ai galéré, vivoté et investi toutes mes économies.

Volontaire, je n’ai rien lâché et j’ai surmonté les moments de découragement. Et j’ai bien fait puisque, courant 2010, une célèbre marque horlogère m’a contactée pour me confier le mandat qui allait tout changer: dénicher une ou un directeur pour l’Asie du Sud-Est. Bingo! Cette mission réussie a enclenché le bouche-à-oreille, ajoutant de la visibilité à ma notoriété naissante. En saupoudrant le tout d’une discrétion à toute épreuve, l’argument indispensable pour bétonner la confiance des grandes enseignes, tous les ingrédients étaient ainsi réunis pour satisfaire les marques de luxe – j’y reviens – dans l’horlogerie, la joaillerie et la mode, ma clientèle.

Aujourd’hui, j’ai une activité sur mesure, un rayon d’action no limit, je rencontre des entreprises et des candidats de Genève à Dubaï, de New York à Singapour, je suis libre et j’entreprends. Pour l’adepte de rencontres, d’art, d’excellence, de voyages et de belles choses que je suis, à quel jackpot de plus pouvais-je rêver?»

Christian Rappaz, journaliste
Christian Rappaz