Le seul distributeur du CAC 40 a certes annoncé en février des ventes et un bénéfice net annuels en progression en 2023. Mais sa situation est contrastée, ce qui pourrait animer son assemblée générale le 24 mai.

Commercialement, d'abord. Le distributeur voit ses parts de marché reculer en France, sous la pression du leader E.Leclerc, très dynamique, et d'Intermarché notamment.

Il doit bénéficier de l'intégration des enseignes Cora et Match, rachetées mi-2023, mais attend toujours le feu vert de l'Autorité de la concurrence.

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Au Brésil, où Carrefour est leader, le contexte de déflation alimentaire, en cours depuis le second semestre 2023, est assez difficile.

Le géant français a dit en février attendre pour 2024 des «conditions de marché plus favorables en Europe», avec un ralentissement de l'inflation, et une «normalisation» de l'environnement économique au Brésil.

Critiques sur le modèle

Carrefour entend poursuivre en 2024 «la transformation de son modèle», accordant une place croissante à l'exploitation de magasins en franchise ou en location-gérance. Cela lui permet de préserver sa part de marché commerciale tout en se libérant d'un certain nombre de dépenses, à commencer par les salaires.

Mais il s'expose à des critiques de plus en plus bruyantes. La branche services de la CFDT l'a assigné début mars devant le tribunal d'Evry (Essonne), critiquant des «délocalisations locales» qui pénalisent les salariés concernés.

Le distributeur est aussi assigné devant le tribunal de Rennes par une «association des franchisés de Carrefour» qui se plaint d'un «déséquilibre significatif» dans la relation franchisé/franchiseur.

Carrefour insiste quant à lui sur «l'attractivité» de sa franchise et le faible nombre de cas de désaccords.

Actionnariat chamboulé

Le milliardaire brésilien Abilio Diniz est décédé mi-février, privant Carrefour d'un «indéfectible allié» - dixit Alexandre Bompard. La holding familiale du milliardaire, Peninsula, reste actionnaire et a assuré Carrefour de son «engagement à long terme».

D'autre part, la famille Moulin-Houzé, propriétaire des Galeries Lafayette, a cédé pour 365 millions d'euros d'actions de Carrefour, tout en réaffirmant son «soutien à l'entreprise». L'opération a fait de Peninsula le premier actionnaire du distributeur.

Elle «signifie que la famille Moulin ne s'attend vraisemblablement pas à une hausse de l'action Carrefour à court terme», a commenté Clément Genelot, analyste de Bryan, Garnier & Co, auprès de L'Agefi/Dow Jones.

Malgré une politique de versement de dividendes et de rachats d'actions, le cours de bourse de Carrefour n'a qu'exceptionnellement retrouvé son niveau de juillet 2017, quand Alexandre Bompard a succédé à Georges Plassat.

En 2023, les actionnaires n'avaient approuvé qu'à une faible majorité la rémunération du PDG.

Une «structure de rémunération qui réponde aux principales préoccupations des actionnaires» doit leur être présentée fin mai, a récemment précisé Carrefour.

Quelle ambition environnementale?

Un autre point pourrait s'inviter au menu de l'assemblée générale: Carrefour fait partie des quelque 200 entreprises internationales déréférencées par la SBTi (Science Based Targets initiative), le principal label pour évaluer les engagements climatiques des entreprises, quant aux objectifs d'atteindre zéro émission nette à horizon 2050.

Motif: elles n'ont «pas étayé leurs engagements» «avec des objectifs précis» dans le délai demandé de 24 mois, indique l'ONG en pointe sur le sujet, Carbon Market Watch.

«Carrefour maintient et confirme son engagement auprès du SBTi», mais dit rendre compte «de ses données uniquement sur des temporalités qu'il maîtrise et peut mesurer», a réagi le groupe auprès de l'AFP.

En 2023, des actionnaires revendiquant détenir plus de 1% du capital du distributeur avaient déjà indiqué s'«interroger sur la stratégie climatique du groupe», le poussant à clarifier certains éléments. Ils pourraient de nouveau interpeller Carrefour fin mai.