Alors comme ça, on retourne massivement en «présentiel», paraît-il. L’idée nous vient toujours du même endroit, la Silicon Valley (ou Siliconne Valley? Pardon, le semestre est long, grand besoin de vacances en «absentiel»). Oui, les moguls de la tech ont inventé les outils, les objets et les technologies nous permettant de travailler à distance, ils sont devenus milliardaires grâce à cela, et au moment où on les utilise à grande échelle, ils virent un peu facho parce que c’est la tendance printemps-été 2025 et décrètent que finalement, c’est mieux de continuer à aller physiquement au bureau. Même chez Zoom, dont le patron déclare, je cite le Figaro: «Il est tout à fait impossible d’avoir une bonne conversation lors de réunions en visio.» Haha. Finie la récréation post-covid, au boulot les feignasses! Et de nombreuses entreprises suivent le mouvement, en se disant: ouais, c’est vrai, il n’y a pas de raison que la vie professionnelle de nos employés consiste à rester à la maison en pyjama devant un écran. (Et pourquoi d’abord, si le boulot est fait, franchement, ça change quoi qu’il soit fait en pyjama, en costard ou à poil?)

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Alors comme il faut bien justifier ce revirement, quelles sont les raisons officiellement avancées? Il y en a principalement deux. La première est connue: télétravail = glande. Forcément, lorsqu’il n’y a pas un petit chef pour nous surveiller, on ne fout rien. Si on ne passe pas avec un badge dans un tourniquet, on n’est pas investi, on promène le chien, on va chercher les gosses, on fait la sieste, on joue à la Play. Peut-être. Mais si on s’y remet à 23 heures ou à 5 heures du matin, si on fait ses heures le week-end, s’il n’y a rien à dire au niveau du travail fourni, encore une fois, quel est le problème? Et nous connaissons tous des gens extrêmement performants dans la réservation de vacances au bureau, dans le brassage d’air inefficace en open space ou dans le lèche-bottisme virtuose en présentiel, mais on estime que ceux-là «travaillent» parce qu’ils sont «au travail». Un chouïa simpliste, non? La deuxième raison est qu’à distance il n’y a plus d’esprit de corps et d’identification à l’entreprise. C’est ironique car nos amis de la tech, encore eux (je mets au masculin parce qu’il y a peu de meufs dans ce cénacle), sont en train d’investir toute leur énergie et leurs millions dans l’intelligence artificielle, la réalité virtuelle, le transhumanisme et les robots, et viennent nous expliquer après qu’il faut retrouver de la convivialité autour de la machine à café, re-haha. D’ailleurs, il est hilarant de voir des entreprises s’échiner à créer artificiellement des moments de détente et d’échange, parce que la réalité d’aujourd’hui est que même sur site, les gens sont seuls devant leur écran avec un casque sur la tête. Objectivement, la solution hybride, par exemple 3 jours/2 jours, devrait être proposée et contenter tout le monde.

Alors pourquoi obliger les gens à revenir à 100%? Selon certains observateurs, c’est plus pervers. De nombreuses entreprises sont en difficulté et savent que certains collaborateurs, par exemple ceux qui ont déménagé dans une autre ville car ils avaient justement la possibilité de télétravailler, ne resteront pas. Et hop, un licenciement de moins à gérer, et hop, un plan social de moins à payer. Cela s’appelle du quiet firing, licenciement silencieux, ou comment transformer le cadre de travail pour le rendre insupportable à l’employé afin qu’il parte tout seul. Dégueu.

Il y a un dernier argument que je peux entendre: le télétravail n’est pas égalitaire. Effectivement, quand on est boulanger, policier, médecin, ouvrier, restaurateur, paysagiste, c’est compliqué en visio. Mais quelle drôle d’idée de dire: celui-là n’a pas cette possibilité, alors on l’enlève à tout le monde! On devrait plutôt tout faire pour améliorer les conditions de travail de ces métiers, et imaginer des congés pénibilité, des jours un peu plus flex, etc. Enfin je dis ça, c’est facile, je suis chez moi en training, grosses chaussettes, t-shirt imprimé «J’peux pas j’ai raclette» (c’est vrai en plus) et tête de zombie. Mon chat est sur le clavier, il ne veut pas partir, alors je le laisse terminer cette chronique: nmejoiwejtbeoiqouhxbyq,,,,