Tout le monde en rêve, il l’a fait: Ulf Grawunder a vendu sa start-up bâloise NBE Therapeutics à Boehringer Ingelheim pour 1,2 milliard d’euros en janvier 2021. Pourtant, quiconque pense que le champagne a coulé à flots le soir de la signature du contrat se trompe. «Je me suis couché dans mon lit, épuisé», se souvient en souriant Ulf Grawunder. D’autant plus que ce n’est pas comme si un acquéreur se présentait soudainement à la porte avec une valise pleine d’argent et achetait une entreprise comme on achèterait un petit pain à la Migros. «Une vente d’entreprise est toujours le résultat d’un long processus, la conclusion de négociations approfondies.» Et le moment doit être bien choisi: «On ne peut pas forcer une vente, il faut attendre que le marché soit prêt.»

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NBE Therapeutics est active dans la médecine de précision. Elle associe des chimiothérapies puissantes à des anticorps afin qu’ils détruisent les cellules cancéreuses de manière ciblée. Cela permet de limiter les effets secondaires néfastes de la chimiothérapie traditionnelle. Jusqu’à récemment, cette technologie encore jeune était accueillie avec beaucoup de scepticisme. Du moins jusqu’à ce que des études précliniques et cliniques prouvent qu’elle fonctionne bien. Il y a actuellement neuf produits approuvés sur le marché, dont cinq au cours des deux dernières années. «Cela a donné un coup de fouet à NBE et à l’ensemble du secteur et a finalement accéléré le processus de vente», analyse Ulf Grawunder.


Les start-up biotech convoitées

Toute personne qui vend une start-up vend généralement non seulement un produit mais aussi de nombreuses espérances quant au potentiel de l’entreprise. Pour déterminer le prix, on s’appuie en général sur des transactions comparables. Il y en a eu plusieurs dans les mois qui ont précédé la vente de NBE. Par exemple, VelosBio a été rachetée par Merck en novembre 2020 pour 2,75 milliards de dollars, et Immunomedics a été rachetée par Gilead en septembre 2020 pour la somme record de 21 milliards de dollars. Ces deux sociétés avaient des produits similaires à ceux de NBE Therapeutics dans le pipeline, mais plus avancés.

«Cela a mis la barre très haut, même pour des produits encore aussi jeunes que les nôtres», se souvient Ulf Grawunder. Par ailleurs, le prix est aussi une question de négociation et il ne faut pas négliger d’éventuelles offres concurrentes. «Si plusieurs acheteurs sont intéressés, c’est généralement toujours payant», assure le fondateur de NBE, qui avait déjà vendu avec succès sa première entreprise, 4-Antibody, en 2012.

La vente ou l’introduction en bourse est une étape logique du développement d’une jeune pousse, dès l’arrivée des premiers investisseurs. En effet, ces derniers ont un objectif clair: multiplier leur mise. D’un côté, cela offre au fondateur des opportunités – le financement de ses projets et de ses recherches – mais aussi des risques, tels que la perte d’indépendance. «Vous renoncez toujours à un certain degré de contrôle», confirme Ulf Grawunder. Il est donc important de pouvoir attirer des «investisseurs à valeur ajoutée», c’est-à-dire qui ont une certaine connaissance du marché et de la technologie. Le fonds de capital-risque de Boehringer s’était déjà associé à NBE à un stade précoce, ce qui était un bon signe quant au potentiel de développement de la start-up biotech bâloise.


Bénéfice pour tous les employés

Avec la vente de l’entreprise, Ulf Grawunder voit son «bébé» s’en aller. Mais pas complètement. Il reste CEO, responsable de la bonne intégration de sa jeune pousse dans le groupe Boehringer Ingelheim et de la poursuite de la croissance. La vente est aussi une confirmation de la qualité du travail accompli depuis la création de NBE, en 2012. «Vous constatez que ce que vous avez mis des années à construire a de la valeur», se réjouit le fondateur. Pour lui et pour toute l’équipe, «tous les employés ont bénéficié financièrement de la sortie».

Mais pour ce biochimiste et biologiste cellulaire de 56 ans, le voyage ne s’arrête pas là. Il continuera à soutenir des start-up. Il vient même d’en créer une autre. «Oui, il y a un nouveau projet, mais ce n’est pas encore le moment d’en parler.»

DH
Dominik Hertach