Les «Petit Poucet» de l’économie suisse le savent trop bien: gérer la logistique d’expédition lorsque l’on compte moins de dix employés peut vite s’avérer cauchemardesque. La faute à leur petite taille, mais surtout aux processus alambiqués pour que le colis arrive à bon port, dans des délais raisonnables et intacts chez le client. Mais avant d’en arriver là, les TPE doivent d’abord choisir l’une des multiples offres de transporteurs, puis se frayer un chemin tant bien que mal dans les paramètres d’inscription auprès des prestataires. Enfin, elles doivent jongler avec des documents douaniers compliqués. Le système est ainsi fait pour que la petite entreprise perde pied tout en rognant sa marge dans des coûts d’envoi exorbitants.

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Depuis sa création en 2015, Expedismart a mis un terme au casse-tête logistique des petites PME. Sur sa plateforme, la start-up genevoise leur permet de comparer instantanément les prestations des transporteurs partenaires (FedEx, UPS, TNT et Aramex) pour trouver une offre adaptée, de réserver et de gérer facilement leurs envois, de bénéficier de conseils en matière d’exportation, de profiter de rabais négociés auprès des transporteurs atteignant jusqu’à 70% du prix public et d’utiliser une seule plateforme pour gérer les envois avec plusieurs transporteurs.

Parcours du combattant

Une vraie révolution pour les TPE. Jusque-là, la complexité – et le coût – de la gestion des expéditions constituait un véritable obstacle dans leur évolution. Léonard Schlaepfer en a fait l’expérience dans ses précédents emplois. Avant de cofonder Expedismart avec son associé Guillaume Heck, l’économiste de gestion de 35 ans a fait ses armes dans la logistique chez Irdam. C’était en 2012. A seulement 28 ans, Léonard Schlaepfer partage la direction de l’entreprise familiale basée à Yverdon-les-Bains et spécialisée dans la production et la vente de stations météorologiques à l’échelle mondiale. Très vite, l’entrepreneur se confronte à la problématique des expéditions: «Chez Irdam, nous devions gérer une douzaine d’expéditions par année. Cela s’est vite avéré compliqué, se souvient Léonard Schlaepfer. Je ne trouvais pas toutes les informations, notamment douanières. Je n’avais aucun outil pour comparer les offres et les services des nombreux transporteurs du marché.»

Son parcours du combattant va durer dix-huit mois avant que l’idée d’Expedismart ne germe. «A chaque envoi, je me disais que ce serait très pratique d’avoir un service comme Ebookers ou Comparis pour sélectionner le transporteur adéquat. Cela simplifierait la vie des petites PME.» Guillaume Heck est dans la confidence. Léonard Schlaepfer prend six mois de réflexion, puis démissionne et s’associe avec Guillaume pour lancer Ikompar, rebaptisée ensuite Expedismart. «Notre modèle d’affaires de départ était de proposer une plateforme à l’image de Comparis, explique Léonard Schlaepfer. Puis, nous nous sommes rendu compte que nous pouvions négocier les tarifs avec les transporteurs en mutualisant les besoins des petites PME.»

Les deux fondateurs prennent donc leur bâton de pèlerin et sondent les entreprises romandes. Toutes revendiquent de la simplicité dans les processus. A la suite de ce constat, le modèle d’affaires d’Expedismart évolue très vite pour proposer un service all inclusive. «Sur notre plateforme, les clients (90% d’entreprises) réservent un transporteur à des tarifs attractifs, souligne Léonard Schlaepfer. Ils bénéficient de conseils tout en trouvant l’ensemble des informations relatives à un envoi, notamment en ce qui concerne la nourriture ou les objets fragiles.» Expedismart gère également le suivi, les formalités douanières et les éventuels blocages.

La Suisse alémanique dans le viseur

Comment la start-up genevoise parvient-elle à négocier des rabais jusqu’à 70% du prix public? «La négociation est liée au volume d’envoi. Expedismart génère actuellement 350 envois par mois. Cette masse critique nous permet de faire baisser les prix. Il y a d’ailleurs un intérêt pour les transporteurs, précise Léonard Schlaepfer. Ils traitent avec un client unique plutôt qu’avec 350 particuliers. Les transporteurs prennent donc moins de risques. Notre objectif n’est pas de batailler sur les prix. Nous voulons offrir un service sur mesure pour les petites PME. Si nous devons rediriger notre client vers les services de La Poste parce que c’est plus avantageux pour lui, nous le ferons.»

Justement, Léonard Schlaepfer et Guillaume Heck ne cachent pas qu’ils ont cherché à intégrer La Poste dès la création d’Expedismart. «Cela ne s’est pas fait, explique le premier. Il y avait une forme de blocage, car notre service comprend la collecte des colis à domicile par un coursier. Nous ne proposions pas un volume d’envois suffisamment intéressant pour séduire La Poste.» Peu importe, la start-up genevoise ne se positionne pas en concurrent du géant national. D’autant que depuis sa création, Expedismart ne cesse de grandir. Aujourd’hui, près de 1500 clients utilisent ses services. La plupart sont donc de très petites PME qui génèrent entre un et quinze envois annuels. Les perspectives sont réjouissantes pour Expedismart puisque la Suisse dénombre plus de 526 000 petites entreprises (de un à neuf employés). Lauréate du prix spécial du jury Genilem qui la coache depuis 2016, Expedismart s’est jusque-là concentrée sur la Romandie. Mais elle lorgne déjà la Suisse alémanique. Avant de franchir le Röstigraben, la start-up, qui emploie quatre personnes, entend toutefois consolider sa présence sur le marché romand, où elle étoffe son offre de transporteurs aux acteurs locaux comme La Vélopostale. Elle mise aussi sur le développement de points de relais, où l’utilisateur pourra choisir de déposer ou chercher ses envois.

Expedismart a donc testé jusqu’à fin janvier ses services d’importation de colis de l’étranger avant d’offrir cette prestation dans les prochains mois. Le but étant de proposer une palette complète de services de qualité. Fort de sa crédibilité, le duo d’entrepreneurs partira ensuite à la conquête de la Suisse alémanique, puis de l’Europe. La Poste a peut-être eu tort de ne pas embarquer à temps dans le train d’Expedismart.

 

 

 

Mehdi-Atmani
Mehdi Atmani