Ces dernières semaines, de nombreux décideurs ont été retardés dans la marche de leurs affaires pour une raison très simple: ils ne pouvaient pas faire authentifier leur signature sur des documents importants, faute d’être physiquement présents lors de l’acte. Heureusement, la procédure de signature électronique a permis de parer au plus pressé durant cette période délicate.

Dans la pratique, les conditions d’utilisation de cet outil numérique ont parfois engendré des problèmes et plusieurs questionnements. A cause du peu d’acteurs homologués sur le marché aptes à proposer le plus haut degré de sécurité aux lois parfois restrictives, la signature électronique en Suisse n’est pas encore totalement efficace pour les PME, et son renforcement ainsi que sa démocratisation semblent être plébiscités.

également interessant
 
 
 
 
 
 

Processus parfois compliqué

Signe positif, le 1er avril 2020, le Conseil fédéral a adopté une modification de l’ordonnance sur les signatures électroniques, qui permet aux prestataires de services de certification reconnus d’établir en temps réel l’identité d’un client via une vidéo. De quoi éviter de de se présenter en personne.

«La nécessité de signer numériquement des contrats de manière juridiquement valable a en effet considérablement augmenté lors de la propagation du coronavirus. Cette mesure, adoptée temporairement durant cette période, permet aux utilisateurs d’utiliser plus largement les possibilités offertes par le commerce et l’administration en ligne, par exemple pour conclure des contrats en ligne ou pour envoyer des documents écrits aux autorités ou aux tribunaux lors de procédures administratives ou judiciaires», explique Matthieu Delaloye, coprésident du comité de l’eGov Innovation Center, le centre de compétence intercantonal romand en cyberadministration.

Reste que certains processus sont compliqués en Suisse, notamment celui de la signature qualifiée, qui requiert de passer par l’un des quatre groupes adoubés par l’Etat (lire encadré). Pour les autres cas de figure, les mentalités évoluent. «Peu de transactions requièrent en Suisse une signature électronique qualifiée assimilable à la signature manuscrite puisque le droit suisse des contrats est basé sur le principe de la liberté de la forme», relève Matthieu Delaloye. A titre d’exemples, le crédit à la consommation n’en pas besoin tandis que les rapports d’audit, les contrats de fusion, de projets de scission ou de transfert de patrimoine, oui.

D’autres types de signatures électroniques peuvent donc être utilisés dans des cas qui ne requièrent pas la signature manuscrite par les deux parties mais qui nécessitent tout de même une vérification de l’identité des signataires. Elles sont d’ailleurs les plus fréquentes et faciles à utiliser en passant par des sociétés ne faisant pas partie des quatre groupes officiels – pour un prix moyen de 50 francs pour les signatures simples, par mois et par signataire.

«Il n’y a en principe pas d’inconvénient à utiliser d’autres prestataires non reconnus, à condition que ces contrats ne requièrent pas spécifiquement la signature manuscrite. Selon nous, il serait toutefois opportun de prévoir une clause contractuelle par laquelle les deux parties acceptent que le contrat soit considéré comme valablement conclu par le biais d’une signature électronique fournie par un prestataire non reconnu», note le cabinet Wilhelm Avocats à Lausanne.

Signalons qu’en Suisse romande le groupe lausannois Elca, avec TrustID, vient de lancer la première identité électronique en Suisse qui permet aux utilisateurs de signer électroniquement en quelques secondes. Romain Prieur, de la société Entreprendre.ch, a également lancé des démarches: «Les signatures électroniques vivent une période ambiguë entre la forte promotion de l’outil par les PME et encore quelques blocages dans les mentalités, notamment de certaines administrations. Mais nous sentons que la crise sanitaire accélère les choses.»


Quatre acteurs en Suisse

La signature électronique est une procédure technique (par exemple par code PIN ou QR code) permettant de vérifier l’authenticité d’un document, d’un message électronique ou d’autres données électroniques, ainsi que l’identité du signataire, en Suisse ou dans l’UE. Mais selon le Code des obligations, seule la signature électronique qualifiée est assimilée à la signature manuscrite. Pour ces cas, elle repose en Suisse sur une infrastructure de certification gérée par des tiers de confiance, c’est-à-dire les prestataires de services de certification. Ils sont au nombre de quatre, à savoir Swisscom, QuoVadis, SwissSign et l’Office fédéral de l’informatique et de la télécommunication.

Un nombre qui devrait néanmoins augmenter avec les demandes en hausse constante. Car en passant par les produits d’un fournisseur reconnu, l’utilisateur a la certitude de la reconnaissance juridique des transactions. Ce n’est donc certainement pas un hasard si le grand assureur Helvetia vient d’investir dans la start-up zurichoise Skribble qui fournit des signatures électroniques juridiquement valables avec le système Swisscom. La jeune pousse se concentre sur des industries nécessitant un grand nombre de signatures, comme les prestataires de services financiers, les assurances, l’immobilier, les services juridiques, les ressources humaines et les offres officielles.

EdouardBolleter
Edouard Bolleter