«Le cerveau est très souple, un peu comme de la panna cotta ou du tofu, explique Nicolas Vachicouras, cofondateur de Neurosoft Bioelectronics. Jusqu’à présent, les interfaces que l’on implantait sur sa surface étaient rigides, ce qui pouvait entraîner des dommages et des complications à long terme.»

Cet aspect a conduit au développement des «soft electronics», un domaine sur lequel se concentre la start-up genevoise depuis 2020. Après avoir étudié les micro- et nanotechnologies à l’EPFL, Nicolas Vachicouras s’est intéressé à l’application de ces techniques dans les implants médicaux, en particulier les interfaces neuronales reliant le cerveau aux ordinateurs. Il les compare à un pacemaker stimulant le cerveau plutôt que le cœur ou à un ECG mesurant l’activité cérébrale plutôt que cardiaque.

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Dans ses recherches initiales, il a notamment collaboré avec le spécialiste des interfaces cerveau-machine Grégoire Courtine, cofondateur d’Onward Medical, sur des études liées à la moelle épinière chez les animaux. «L’objectif de notre start-up est de faire en sorte que ces technologies aient un véritable impact sur les patients», souligne Nicolas Vachicouras. La start-up dénombre aujourd’hui 14 collaborateurs. Elle a levé 10,5 millions de francs grâce à des bourses et à des investisseurs privés et collabore avec une quinzaine d’hôpitaux dans le monde, dont le CHUV et les HUG en Suisse. Elle prépare actuellement une nouvelle levée de fonds de 13 millions de francs.

Première mondiale

Neurosoft Bioelectronics vient d’annoncer la mise au point d’un implant cérébral élastique de 64 électrodes testé sur l’humain, ce qui représente un record mondial. «Travailler sur des matériaux souples est beaucoup plus compliqué que sur des matériaux classiques rigides, souligne le cofondateur. En ce qui concerne le nombre d’électrodes, on peut faire une analogie avec les pixels sur un écran: plus il y en a, meilleure est la résolution.»

Ainsi, l’exactitude de l’enregistrement des données cérébrales se trouve nettement améliorée. L’application principale porte sur le traitement de l’épilepsie. L’implant épouse parfaitement la surface du cerveau, ce qui permet aux neurochirurgiens d’identifier avec une grande précision les tissus épileptiques au cours de l’intervention et de les distinguer des tissus sains, réduisant ainsi le risque d’ablation excessive ou insuffisante. Aujourd’hui, environ un tiers des patients souffrent encore de crises d’épilepsie après une opération.

50 millions

Le nombre de personnes dans le monde concernées par l’épilepsie. Un tiers d’entre elles ne peuvent être traitées par des médicaments. Il faut par conséquent les opérer et retirer la partie du cerveau responsable de cette maladie.

Comme le cerveau régule l’ensemble du corps humain, les possibilités d’applications sont vastes. Au-delà de l’épilepsie, la start-up s’intéresse aux patients souhaitant récupérer l’usage de leurs bras à la suite d’un AVC ou d’une lésion de la moelle épinière. Dans ce cas, l’électrode n’est pas utilisée pour détecter des zones problématiques dans le cerveau, mais pour enregistrer et interpréter des intentions de mouvements du patient. La société souhaite aussi lancer une étude pilote concernant les acouphènes. Elle vise un lancement de son produit sur l’épilepsie en début d’année prochaine sur le marché américain, puis en Europe, dès que les études cliniques seront finalisées.