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Fondée dans les années 1960, la Société maritime de transport est désormais dirigée par Patrick Brechtbühl, 31 ans, qui a repris l’affaire familiale. Le jeune directeur mise sur la proximité et les marchés de niche, comme le transport équestre.
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Lorsque Somatra voit le jour, en 1959, elle incarne une vision ambitieuse: connecter Genève au reste du monde via les mers. Quatre associés – dont la famille fondatrice Steinbach – posent les jalons d’une entreprise tournée vers le grand large. «A l’origine, Somatra était exclusivement dédiée au transport maritime. Son nom est du reste une contraction de Société maritime de transport», raconte Patrick Brechtbühl, 31 ans, directeur général depuis janvier 2024.
Mais les vents économiques et géopolitiques tournent, et Somatra évolue avec son temps. Du fret maritime, elle passe au transport routier et au fret aérien, aujourd’hui son activité phare. Une mue menée en toute discrétion par une femme: Eveline Brechtbühl. «Ma mère est arrivée à Genève à 20 ans, avec un dictionnaire français-allemand comme seul bagage», confie Patrick Brechtbühl. Après des études d’agent transitaire, la jeune Schwytzoise débarque en Suisse romande pour un stage d’un an chez Somatra. Elle ne quittera plus jamais ni la société, ni la Cité de Calvin.
«Elle a gravi les échelons un à un, jusqu’à devenir actionnaire majoritaire», lance son fils, admiratif. Un parcours d’autant plus remarquable qu’il s’est construit en tant que mère célibataire, dans un univers professionnel largement masculin. A bientôt 67 ans, Eveline Brechtbühl préside aujourd’hui le conseil d’administration tandis que Jean-Rodolphe Stalder, ancien dirigeant de Somatra, fait partie des actionnaires de la société. Leur expérience est précieuse pour le jeune dirigeant, qui n’hésite jamais à leur demander conseil.
Enfant, Patrick Brechtbühl ne rêvait pas de travailler dans l’entreprise. Il se voyait plutôt devenir avocat mais a compris assez vite qu’il n’était pas fait pour de longues études. Féru d’équitation, il participe en tant que cavalier amateur à de nombreux concours de saut d’obstacles, une passion qui influencera plus tard le développement de nouvelles activités chez Somatra. C’est durant son bachelor, dans un cursus sport-études à l’ESM Ecole de management et de communication à Genève, qu’il y travaille à temps partiel, dans la prospection commerciale.
«Dans les sociétés familiales, on a l’étiquette de fils de...»
Patrick Brechtbühl, directeur général, Somatra
C’est à ce moment qu’il réalise à quel point il se plaît dans ce domaine. Dès 2018, il apprend à connaître tous les départements de l’entreprise – il a passé son permis de chauffeur poids lourds. «Dans les sociétés familiales, qu’on le veuille ou non, on a l’étiquette de fils de... Il me semblait important de faire mes preuves, sans fanfaronner», relève Patrick Brechtbühl.
Aujourd’hui, Somatra dispose de trois bureaux à Genève – le siège aux Ports Francs, à Bardonnex près de la frontière et à l’aéroport de Cointrin – ainsi que d’un bureau à Zurich, «la Mecque du fret aérien». L’entreprise emploie une vingtaine de personnes et possède une dizaine de véhicules. Le transport maritime, ADN historique de l’entreprise, ne représente plus qu’une activité minoritaire. «Les compagnies maritimes ont verticalisé leurs services, en achetant des ports, des agences en douane, des camions et même des avions, explique Patrick Brechtbühl. On conserve ce service par fidélité aux clients que nous avons depuis des décennies et afin de pouvoir proposer tout type de transport.»
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Pour se différencier dans un marché ultra-compétitif, le Genevois mise sur le sur-mesure et sur les activités de niche. Comme le transport équestre, domaine qu’il maîtrise parfaitement grâce à son passé de cavalier. «Il y a beaucoup de formalités à remplir lorsque l’on sort des frontières avec un cheval et cela peut vite devenir un casse-tête administratif, explique-t-il. Pris en charge par Somatra, le client qui doit dédouaner son cheval ne passe en général pas plus de dix minutes à la frontière. Une rapidité essentielle pour le bien-être du cheval, pour qui le temps passé dans un véhicule peut être très stressant.»
Somatra a également lancé un service de location de chauffeurs, notamment pour des banques genevoises, assurant les transports de personnes entre l’aéroport, les établissements bancaires et les hôtels. Depuis dix-sept ans, l’entreprise développe aussi la logistique événementielle clés en main pour des clients du luxe qui participent à des manifestations dans toute l’Europe. Elle cherche également à se diversifier auprès des marques de sport et des entreprises automobiles.
Le métier de transporteur fait face à de nombreux défis. En raison du trafic engorgé, d’une part, et de la pénurie de chauffeurs, problème endémique du secteur. «Il y a eu énormément d’abus dans ce domaine en Europe, avec des horaires surchargés et des salaires misérables. Pour nous, les chauffeurs sont l’image de la société et c’est son rôle de rendre les conditions de travail les plus agréables possible.»
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Face à une quarantaine de concurrents genevois, dont beaucoup ont été rachetés par des groupes, Somatra met aussi l’accent sur ses racines locales et sa proximité avec le client. Une stratégie qui s’avère payante, la société ayant traversé la pandémie sans licenciements. La vision de l’avenir du jeune dirigeant? «Je suis très attaché au fait que Somatra reste à taille humaine. Par contre, j’aimerais réussir à nous développer, en nous aventurant dans de nouveaux marchés, projette-t-il. J’adore ce secteur, on ne s’y ennuie jamais car il n’y a aucune routine et aucun transport qui ne se passe de la même manière.»
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