Felix Adamczyk, 36 ans
Fondateur et CEO de Qiio, Zurich

Felix Adamczyk amène la sécurité de l’internet des objets au niveau supérieur de façon ludique.

© Roger Hofstetter

Felix Adamczyk a révolutionné la sécurité dans l’internet des objets (IoT). Ce domaine consiste à intégrer dans chaque objet une puce qui le relie à internet. Un ascenseur pourrait ainsi signaler à une machine à café l’arrivée de visiteurs. «La domotique est un gadget formidable, mais son utilité est limitée pour les particuliers», constate Felix Adamczyk. Il en va différemment dans le domaine des entreprises, ajoute-t-il. «Si un ascenseur ne fonctionne plus, un employé de service doit se déplacer en voiture. Sur place, il constate qu’un redémarrage du logiciel aurait suffi. L’IoT permettrait de vérifier l’état du système à distance et d’éviter le déplacement en voiture, avec toutes les conséquences économiques et environnementales que cela implique. Des millions de trajets pourraient ainsi être évités dans le monde entier.»

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Sa firme Qiio est un partenaire clé mondial de Microsoft lorsqu’il s’agit d’offrir des connexions sécurisées dans l’IoT. La solution se compose d’équipements, de logiciels et d’une connectivité globale qui peuvent également être utilisés indépendamment les uns des autres. «Alors que l’on installe un programme antivirus dans l’ordinateur, qui est un logiciel, notre protection est une pièce de hardware fabriquée en silicium.» L’avantage de cette solution est que chaque signal doit passer physiquement par cette pièce. A la question de savoir pourquoi les pirates informatiques s’en prennent aux installations industrielles telles que les machines à café, les portes coulissantes et les ascenseurs, Felix Adamczyk répond: «Il s’agit par exemple de réseaux de robots informatiques qui utilisent la bande passante de ces installations IoT pour s’introduire dans les zones sensibles des entreprises.» Un danger contre lequel lutte Qiio.


Marc Aeschlimann, 38 ans
Fondateur et CEO de Smood, Plan-les-Ouates (GE)

Marc Aeschlimann veut transformer Smood en «un couteau suisse numérique» qui s’applique à presque tous les domaines de la vie.

Marc Aeschlimann figure parmi les grands gagnants de la pandémie. Son service de livraison de repas Smood, fondé en 2012, a littéralement explosé lors des lockdowns, avec un chiffre d’affaires annuel de plus de 100 millions de francs. «Le covid nous a catapultés deux ou trois ans en avant», dit Marc Aeschlimann, dont le hobby est la plongée en apnée. Dernièrement, un conflit avec les chauffeurs au sujet du salaire minimum a quelque peu freiné la croissance, mais depuis qu’un accord a pu être trouvé avec les syndicats en février, la flotte de Smood (vélos, motos et Smart) est de nouveau sur les routes.

A moyen terme, Smood doit devenir, comme le dit Marc Aeschlimann, «un couteau suisse numérique» qui s’applique à presque tous les domaines de la vie. Le service permettra d’expédier des médicaments (un essai sur le terrain est déjà en cours), d’apporter les chemises au pressing, de livrer aux entreprises le toner pour les imprimantes. La part de ces livraisons non alimentaires devrait passer de 10% actuellement à 40% du chiffre d’affaires d’ici à la fin de 2024.


Wiktor Bourée, 31 ans
Fondateur et CEO de Technis, Lausanne

Wiktor Bourée. CEO TEchnis. Lausanne

Wiktor Bourée s'est développé avec Technis à Paris et à Boston.

© Dr. Najib LATIF

Wiktor Bourée a obtenu un master en ingénierie chimique à l’EPFZ et a développé une technologie de traitement de l’eau non potable à l’Université Harvard. Il a ensuite fondé l’entreprise Technis à l’âge de 23 ans. Basée à Lausanne, la start-up a commencé par fabriquer des revêtements de sol intelligents, capables de détecter, d’identifier et de prédire les activités qui se déroulent sur leur surface grâce à des capteurs. Entre-temps, l’offre s’est élargie à une gamme complète de capteurs, permettant par exemple de surveiller la qualité de l’air. La famille de logiciels de Technis est considérée comme la plus intuitive du marché. Cette technologie aide les entreprises à gérer des sites différents et à prendre des décisions opérationnelles en leur fournissant des données en temps réel sur le parcours des clients dans un bâtiment. Technis emploie actuellement plus de 50 personnes et a ouvert deux nouveaux bureaux à Paris et à Boston.


Melanie Gabriel, 33 ans
Cofondatrice et CMO de Yokoy, Zurich

Melanie Gabriel a attiré avec Sequoia un investisseur de renom de la Silicon Valley.

Les douze derniers mois n’auraient pas pu mieux se dérouler pour Melanie Gabriel, cofondatrice et responsable marketing de la start-up fintech Yokoy. En novembre dernier, UBS signe un partenariat avec la jeune entreprise. En février, Yokoy s’étend aux Pays-Bas (des bureaux existent déjà à Munich et à Vienne). En mars, Sequoia Capital, l’investisseur bien connu de la Silicon Valley, entre dans le capital de la start-up en plein essor avec 80 millions de dollars. Fondée en 2019 par Melanie Gabriel et quatre compagnons de route, Yokoy utilise l’intelligence artificielle pour automatiser l’ensemble du processus des dépenses et des cartes de crédit d’entreprise. La start-up compte aujourd’hui plus de 500 clients dans le monde, dont Stadler Rail, On Running, Swissquote et Bobst.


Cristian Grossmann, 40 ans
Cofondateur et CEO de Beekeeper, Zurich

Digital Shapers 2020 Scalers Christian Grossmann Beekeeper Joseph Khakshouri

Cristian Grossmann gère la communication des entreprises avec leurs employés via son application.

© Joseph Khakshouri

Cristian Grossmann a créé Beekeeper il y a dix ans. Mais la genèse de l’entreprise remonte à bien plus loin. A l’origine, l’équipe de cofondateurs avait développé une application de rencontre. Cette app n’a pris son visage actuel qu’au troisième essai, en tant que plateforme dédiée aux collaborateurs de secteurs tels que l’hôtellerie ou le commerce de détail. Grâce à l’application, les entreprises peuvent communiquer avec leurs employés en leur envoyant les tableaux de service et gérer le paiement des salaires. Le succès de Beekeeper est spectaculaire. La firme emploie environ 200 collaborateurs dispersés sur quatre sites dans le monde et compte de gros clients comme le détaillant Coop ou le géant américain du commerce Cargill. 

Le défi est maintenant d’atteindre le seuil de rentabilité, ce qui sera fait d’ici à deux ans, selon Cristian Grossmann. Le saut en bourse devrait suivre. Le CEO affirme: «Nous sommes en passe de devenir une licorne» (c’est-à-dire une start-up valorisée à plus de 1 milliard de dollars). L’entrepreneur de 40 ans a grandi au Mexique dans une famille aux racines helvétiques. Il est lui-même détenteur d’une part de capital de Beekeeper «suffisamment importante pour rester motivé», dit-il en plaisantant. Pendant le peu de temps libre qu’il lui reste, cet amateur d’endurance pratique le triathlon. Il va devenir père pour la première fois d’ici à la fin de l’année.


Severin Hacker, 37 ans
Cofondateur et directeur technique de Duolingo, Pittsburgh, Pennsylvanie, États-Unis

Severin Hacker poursuit résolument sa mission de rendre la meilleure éducation du monde universellement accessible.

Fondée par Severin Hacker, Duolingo permet d’apprendre les langues en s’amusant. Cette application développée en collaboration avec Luis von Ahn est aujourd’hui devenue le logiciel d’apprentissage des langues le plus utilisé du monde. En tant que CTO, Severin Hacker est responsable de la vision technique et des activités. Les déclinaisons du produit se sont multipliées. Après une application d’apprentissage de la lecture pour les enfants, la start-up travaille sur une app pour les mathématiques. Severin Hacker prévient toutefois: «Nous n’avons pas encore gagné.» Cette formule est l’un des mantras de l’entreprise. L’objectif à long terme de Severin Hacker est de rendre accessible à tous la meilleure éducation du monde. 

Duolingo se développe sur tous les marchés, avec une croissance particulièrement rapide en Asie. «Nous avons une mission essentielle à accomplir, c’est ce qui me motive», déclare l’entrepreneur. Duolingo a franchi une étape importante avec son entrée en bourse l’été dernier aux Etats-Unis. «Nous avons commencé à travailler comme une entreprise cotée plusieurs trimestres avant l’introduction en bourse», explique Severin Hacker. Cette préparation a porté ses fruits. Bien accueillie par le marché, Duolingo pèse quelque 4 milliards de dollars.


Jasmine Kent, 38 ans
Cofondatrice et CTO de Dufour Aerospace, Zurich

Jasmine Kent construit un aéro-nef à propulsion hybride capable de voler aussi vite qu’un avion.

Les vols d’essai du prototype de l’Aero2 ont comblé de joie Jasmine Kent. C’est avec fierté que la cofondatrice et CTO de Dufour Aerospace lance une vidéo prise avec son téléphone portable qui montre l’avion à décollage vertical quitter la piste de l’aérodrome de Dübendorf (ZH). Jasmine Kent a fondé la start-up avec Thomas Pfammatter et Dominique Steffen il y a deux ans dans le but de faire progresser l’aviation durable. Les ingénieurs de Dufour ont développé un avion polyvalent à propulsion hybride. Grâce à des ailes basculantes, il peut décoller et atterrir verticalement, comme un hélicoptère, tout en étant capable de voler sur de longues distances, comme un avion. L’histoire de l’entreprise a commencé comme un hobby. Il y a six ans, Thomas Pfammatter et Dominique Steffen ont construit le premier avion de voltige à propulsion électrique au monde.

«C’était un projet purement ludique. Mais ils ont très vite identifié le potentiel des moteurs électriques dans l’aviation», explique Jasmine Kent. Les deux inventeurs ont ensuite fait appel à elle en tant que spécialiste des systèmes de commande numériques, des logiciels et de l’automatisation. Jasmine Kent a été pendant de nombreuses années développeuse de logiciels chez Google, à Zurich et en Californie. Avec deux collègues de Google, cette Américaine a fondé en 2016 une première start-up, Daedalean, qui développe des systèmes logiciels de contrôle autonome pour l’aviation civile.

«Avec l’Aero2 de Dufour Aerospace, nous voulons réduire l’empreinte carbone dans l’aviation et aussi réunir les secteurs des drones et de l’aviation habitée», explique l’ancienne ingénieure de Google. Cette solution a le potentiel d’accélérer la logistique, notamment pour les échantillons médicaux ou les organes de donneurs à transplanter. Les appareils de Dufour peuvent également être utilisés pour le sauvetage aérien, ainsi que pour les missions de recherche en terrain difficile et par mauvais temps. 

Les entrepreneurs souhaitent en outre gagner des clients dans le secteur des transports publics et de l’énergie, car les avions hybrides peuvent aussi être utilisés pour la surveillance d’infrastructures telles que les voies ferrées ou les pylônes électriques. Jusqu’à présent, ce sont surtout des hélicoptères qui sont utilisés pour ces activités, notamment par les CFF qui survolent chaque année ainsi l’ensemble du réseau ferroviaire. Les appareils de Dufour pourraient effectuer cette tâche de manière nettement plus rapide, plus économique et plus écologique. Le succès semble au rendez-vous puisque Blueberry Aviation a signé un contrat d’achat pour 200 avions Dufour.


Samuel Müller, 42 ans
CEO Scandit, Zurich

Digital Shapers 2020 Scalers Samuel Müller Scandit Joseph Khakshouri

Samuel Müller a récolté avec Scandit 150 millions de francs supplémentaires auprès d’investisseurs début 2022.

© Joseph Khakshouri

L’entreprise de logiciels Scandit a attiré l’attention du public en atteignant une valorisation de plus de 1 milliard de francs début 2022, grâce à un financement supplémentaire de 150 millions de francs. Selon le CEO et cofondateur Samuel Müller, il s’agit surtout d’un seuil symbolique. Il ajoute: «Néanmoins, l’intérêt a bondi lorsque nous avons soudainement intégré le club des licornes.» Entreprise discrète, Scandit s’est depuis longtemps imposée comme leader du marché dans les secteurs où ses produits sont présents. La firme développe des logiciels de scannage intelligents pour les smartphones et autres appareils comme les robots ou les habits dotés de capteurs. Les compétences de Scandit vont du simple lecteur de code-barres à l’analyse intelligente d’images. En Suisse, quiconque scanne un code QR avec Twint utilise la technologie Scandit. C’est aussi le cas lorsque l’on fait ses achats chez Coop avec Passabene.

L’expansion de la firme dépasse de loin les frontières helvétiques. «Vu l’exiguïté du marché intérieur, nous avons très tôt tourné notre regard vers l’étranger. C’est ainsi que nous nous sommes très vite concentrés sur les Etats-Unis», relate Samuel Müller. Aujourd’hui, l’entreprise connaît également une forte croissance en Asie. Jalon significatif, la Grande-Bretagne a passé une commande importante pour les solutions de scannage dans le cadre des tests covid menés par le gouvernement. La Suisse reste un site essentiel pour Scandit, souligne Samuel Müller. «Nous tirons toujours de grands bénéfices de nos relations avec les hautes écoles comme l’EPFZ ou l’EPFL.» Douze ans après sa création, Scandit emploie aujourd’hui environ 550 personnes dans le monde.

La prochaine étape sera les solutions de scannage autonomes. Des robots de nettoyage pourront scanner les rayons lors de leur passage dans les espaces de vente et enregistrer les produits qui doivent être réapprovisionnés. Le scannage identifiera aussi les étiquettes dont les prix ne sont plus corrects et les produits mal remis en place par les clients. Dans ce domaine, les Etats-Unis et leurs grands magasins représentent un marché test primordial.

Faut-il s’attendre à une prochaine entrée en bourse? Samuel Müller répond: «Ce n’est pas la priorité pour le moment. Pour l’instant, il s’agit de continuer à progresser et de consolider notre position de leader mondial.»


Guillaume Pousaz, 41 ans
Fondateur et CEO de checkout.com, Londres, Grande-Bretagne

Bilanz 08/2020 Markets Pousaz Guillaume

Guillaume Pousaz est le fondateur et copropriétaire de la start-up européenne la plus valorisée.

© MICHAEL BUHOLZER

Fondateur de Checkout.com, Guillaume Pousaz détient actuellement le titre de créateur de la start-up la plus valorisée d’Europe. Genevois d’origine, il a lancé en 2012 à Londres cette société de traitement des paiements numériques. Dix ans plus tard, la firme vaut quelque 40 milliards de dollars et emploie plus de 2000 collaborateurs dans le monde. Vu la tourmente financière actuelle, le timing de l’augmentation du capital s’est révélé parfait. Guillaume Pousaz a bouclé le dernier tour de financement en janvier dernier. Celui-ci a rapporté 1 milliard de dollars. Quelques semaines plus tard débutait la crise ukrainienne. Dans la foulée, les actions tech se sont effondrées, ce qui a entraîné des baisses de valeur dramatiques pour nombre de fintechs et de start-up.

Guillaume Pousaz vit avec sa famille à Dubaï et fait l’aller--retour à Londres chaque semaine. Il souhaite utiliser les fonds levés pour développer ses activités aux Etats-Unis. «C’est le plus grand marché pour l’e-commerce en dehors de la Chine. Nous y voyons de grandes opportunités», dit-il. Les tensions sur les marchés boursiers lui ont fait suspendre le projet d’une entrée en bourse imminente. L’entrepreneur souligne: «Nous nous concentrons maintenant sur la mise en place du meilleur modèle possible.»


Amir Suissa, 50 ans
Fondateur et président de Wefox, Zurich

Digital Shapers 2021 The Scalers Amir Suissa, Wefox ©Nik Hunger

Amir Suissa a obtenu 400 millions de dollars supplémentaires avec Wefox lors d’un tour de financement en juillet.

© Nik Hunger

Amir Suissa s’est fait un nom dans le secteur technologique en tant qu’investisseur et serial entrepreneur. Il est présent dans le capital de start-up suisses comme la plateforme de crédit Lend, la place de marché pour l’immobilier Crowdhouse ou le réseau de fidélisation Poinz. En 2020, il a acquis CNC24.com, la plus grande plateforme européenne pour la production de pièces techniques (CNC). Depuis 2021, Amir Suissa soutient l’équipe fondatrice de Brainforest, un incubateur de start-up écologiques lancé par des entreprises et des ONG. Parmi les entreprises qu’Amir Suissa a créées figurent Swissinvest.com, First Tuesday Zurich, DeinDeal et Wefox, la plus grande start-up européenne dans le domaine de l’assurance. 

Chez Wefox, ce double national israélo-suisse a été président du conseil d’administration depuis sa création en 2015 jusqu’à 2021. Alors que de nombreuses start-up sont confrontées à des problèmes de financement en relation avec le contexte financier troublé, Wefox a levé 400 millions de dollars lors d’un tour de financement de série D en juillet. Sa valorisation est ainsi passée de 3 à 4,5 milliards de dollars en l’espace d’un an. Pour la première fois, Wefox compte plus de 2 millions de clients. Les effectifs ont quadruplé dans le même temps. Quelque 550 personnes étaient employées fin 2021. Les collaborateurs devraient être plus de 2000 fin 2022. Amir Suissa souligne: «Avec Wefox, nous avons prouvé qu’il est également possible de créer en Europe des entreprises technologiques à forte croissance, et pas seulement aux Etats-Unis.»