L’article de couverture était consacré aux derniers développements du Vidéotex (VTX), un système permettant de consulter à distance des pages au graphisme rudimentaire via un terminal informatique. Le journaliste porte un constat sévère sur les services disponibles alors en Suisse: «Mis à part quelques compagnies comme Swissair, laquelle offre en grande première la réservation ’at home’, peu de prestataires ont réussi à exploiter judicieusement le caractère principal du VTX: son mode transactionnel (la possibilité qu’a l’utilisateur d’intervenir dans la communication, grâce au clavier).»

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L’argent seul ne suffit plus

Le spectacle proposé s’avère même «affligeant»: «Pour la plupart, les firmes communicantes se contentent de fournir à l’écran, à un tarif de 6 à 12 francs l’heure, l’apologie de leur production, parfois l’organigramme de leurs services […]. On compte sur les doigts de la main celles qui ont su – et osé – s’ouvrir à la transaction «online» en offrant davantage que la simple commande d’une documentation.»

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"PME Magazine", novembre 1989.
© DR

Le dossier économique de ce numéro revient sur le salaire des cadres. Il est précisé que 50% des revenus des cadres se situent entre 76 800 et 122 000 francs. «Et les PDG encaissent en moyenne presque 200 000 francs. Mais les bons salaires ne suffisent plus, les ’fringe benefits’ font la différence!» L’étude sur laquelle se base l’article dresse le portrait-robot du cadre suisse moyen: il a 45 ans, 11 années de service, dont six ans d’expérience dans son poste, et dirige cinq collaborateurs subordonnés.

En termes de rémunération, il perçoit un salaire fixe de 86 700 francs et 8500 francs de gratifications, à quoi s’ajoutent diverses prestations supplémentaires. Parmi les plus répandues, on note que «la voiture de service assortie de l’usage privé gratuit enregistre une tendance à la hausse». Autres «susucres»: «Près de la moitié des entreprises interrogées offrent aux cadres leurs propres produits ou d’autres à des prix réduits.»

Enfin, 90% des sociétés sondées ont conclu pour leurs cadres «des assurances supplémentaires qui ne sont pas toutes prescrites par la loi».

Le XXIe siècle sera un monde de changements technologiques et de fluctuations imprévisibles.

«Le XXIe siècle sera un monde où régnera une très vive concurrence économique et où les conflits économiques seront continuels, un monde où les fluctuations seront imprévisibles et les changements technologiques critiques», explique-t-on en introduction d’un article consacré à une étude sur le profil du «top manager du XXIe siècle».

Les qualités indispensables du dirigeant de demain? «Ce sera un homme ou une femme capable de faire accepter à ses collaborateurs les objectifs de l’entreprise, apte à la communication à tous les échelons hiérarchiques et ayant l’habitude des médias. Il ou elle devrait par ailleurs témoigner d’un esprit créatif, pouvoir faire preuve d’enthousiasme […], être ouvert, sincère et intelligent, ainsi que savoir faire face à des situations conflictuelles.»

S’y ajoutent encore «un sens élevé des responsabilités» et «une réputation irréprochable». Et le journaliste de noter que l’on peut «se permettre de douter que l’on rencontrera en l’an 2000 le PDG idéal que nous décrit l’étude».

 


30 ans de santé: la technologie au cœur de la médecine

Le secteur des soins s’est considérablement transformé ces trois dernières décennies, bouleversé notamment par le numérique et de nouvelles avancées technologiques.

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Ernesto Bertarelli a transformé Serono dans les années 90 en société biotech, revendue en 2007 à l’allemand Merck.
© Keystone

Medtech, biotech, data: ces termes dessinent aujourd’hui le nouveau visage du secteur de la santé. Non plus seulement cantonné aux pratiques hospitalières, ce domaine a vécu ces trente dernières années une profonde métamorphose. Désormais, nouvelles technologies et start-up occupent une place prépondérante dans la pratique médicale. En Suisse, le secteur des sciences de la vie compte aujourd’hui 1400 entreprises réalisant au total 15,8 milliards de francs de chiffre d’affaires, soit 2,3% du PIB national selon l’association Swiss Medtech. Cela en fait une des branches économiques les plus dynamiques du pays.

1. La LAMal bouleverse les pratiques

L’introduction de la loi sur l’assurance maladie (LAMal) en 1996 a largement transformé le système de santé suisse. La législation instaure une obligation universelle de s’assurer contre la maladie. Elle permet de changer librement de caisse, prévoit des primes identiques pour les hommes et les femmes et supprime les cotisations par classes d’âge. Cette nouvelle formule a cependant entraîné une explosion des coûts. Entre 1990 et 2018, le pourcentage du PIB dédié aux frais de santé a plus que doublé, selon l’Office fédéral de la statistique. Le coût moyen de l’assurance maladie de base a quant à lui pratiquement triplé depuis l’introduction de la LAMal.

2. La révolution du numérique

Des smartphones qui mesurent le rythme cardiaque aux lentilles de contact pour le diabète: ces dernières années marquent l’émergence de la mesure de soi, ou «quantified self». «La gestion de ces données concentre un des défis majeurs de la santé de demain, explique Benoît Dubuis, directeur du Campus Biotech à Genève. L’accès à ces données ouvre de nouvelles perspectives allant de la prise en charge des patients à la façon de conduire la recherche. La donnée est au cœur de la transformation du monde médical, et permet la matérialisation de cette médecine dite ‘des quatre P’: prédictive, préventive, personnalisée et participative.»

La médecine basée sur les données permet d’intervenir plus tôt, à l’aide de diagnostics probabilistes personnalisés et de mesures de prévention. Elle vise à donner un traitement aux personnes les plus susceptibles d’y répondre, et promet ainsi une efficacité supérieure et une baisse des coûts globaux de la santé. Cependant, le fait d’individualiser les traitements va augmenter leur nombre, avec le risque d’en faire augmenter le prix. Néanmoins, «un traitement curatif même onéreux peut s’avérer in fine moins coûteux qu’un traitement chronique, souligne Benoît Dubuis. C’est d’ailleurs sur cette base que sont fixés les tarifs de nouveaux produits.»

3. Épidémiologie digitale

L’entreprise lausannoise Sophia Genetics utilise les données génomiques, soit les détails de l’ADN, pour aider les cliniciens à mieux prendre en charge leurs patients. Leur intelligence artificielle comptabilise déjà plus de 400 000 patients dans sa base de données avec plus de 16 000 profils s’ajoutant chaque mois. «Sur la base de l’analyse des données de plus de 1000 hôpitaux universitaires mis en réseau, notre algorithme d’intelligence artificielle parvient à détecter les mutations génomiques parmi des milliards de données complexes, puis les caractérise selon leur degré de pathogénicité. Dans le cadre du cancer, cette information va servir à déterminer le profil d’une tumeur afin que les médecins puissent trouver la combinaison de traitements qui a le plus fonctionné sur des patients du même type, détaille Jurgi Camblong, directeur et cofondateur de Sophia Genetics. Plus nous avons d’hôpitaux en réseau, plus l’algorithme devient précis, ce qui crée un cercle vertueux et renforce le savoir collectif. Cette médecine basée sur les données permet alors de faire de l’épidémiologie en temps réel.»

4. L’émergence de la Health Valley

«Depuis son avènement au début des années 2000, le domaine des sciences de la vie en Suisse romande a vu converger les biotechnologies, l’informatique, la medtech, les micro- et nanotechnologies, en apportant ainsi de nouveaux outils au monde médical, analyse Benoît Dubuis. Cette interface multidisciplinaire s’avère incroyablement prometteuse et permet d’aller au-delà de la médecine telle que nous la connaissons.»

Cet écosystème d’entreprises de Suisse romande, baptisé Health Valley en référence à la Silicon Valley californienne, fait partie des trois plus importants centres de recherche européens du secteur, avec les régions anglaises d’Oxford et de Cambridge. En 2018, 534 millions de francs ont été investis dans les start-up de la Health Valley, avec plus de 15 entreprises créées chaque année depuis 2010.

La Suisse se distingue aujourd’hui comme un cluster des technologies médicales. Les start-up s’imposent, soutenues par des incubateurs comme Eclosion, Fongit, MassChallenge ou Innosquare. Des fonds de capital-risque émergent, à l’instar de NanoDimension ou de Medixci, afin de soutenir leur croissance. Le secteur de la biotech suisse est en pleine croissance: le chiffre d’affaires du secteur a augmenté de 6% en 2018. Le nombre de collaborateurs a quant à lui augmenté de 4%, selon Swiss Biotech; 94% des fabricants de biotechnologies travaillent en coopération avec des hôpitaux, des universités ou des entreprises pharmaceutiques ou d’ingénierie. «L’interdisciplinarité et les coopérations entre les secteurs représentent l’avenir de la santé», estime Jurgi Camblong de Sophia Genetics, qui vient par ailleurs d’engager un partenariat prometteur avec l’entreprise de biopharmaceutique ADC Therapeutics (lire aussi p.19).

 


Le Nord vaudois mise sur ses parcs d’innovation

Grâce au développement de centres d’activités, la région s’affirme comme un pôle d’attractivité économique, notamment en matière d’innovation médicale.

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L’Y-Parc a bénéficié de plus de 300 millions d’investissements en 2018.
© Y-Parc

«Nous pouvons faire du Nord vaudois une région experte dans le domaine de la santé, souligne Nadia Mettraux, directrice de l’Association pour le développement du Nord vaudois (ADNV) qui gère la promotion économique et touristique de la région. La cybersanté serait légitimement un des axes stratégiques de notre développement et une carte de visite forte pour la région.» La directrice ambitionne de faire du Nord vaudois une région pionnière en matière de médecine personnalisée.

Parallèlement, les différents établissements hospitaliers assurent une couverture médicale importante dans la région grâce à leurs 1827 collaborateurs et le nouveau Centre universitaire de médecine générale et santé publique du canton de Vaud inauguré en 2019. Le canton a également mis en place de nombreuses initiatives de soutien aux entreprises. La région dynamisée a ainsi attiré de nouveaux travailleurs, la population ayant augmenté de 40% en trente ans.

Le dynamisme des parcs d’activités

Le Nord vaudois bénéficie aussi d’un renouveau économique grâce au développement de centres d’activités. Ces regroupements d’entreprises dynamisent la région, à l’instar du Technopôle de Sainte-Croix, du TecOrbe d’Orbe ou de l’Y-Parc d’Yverdon-les-Bains. Ce dernier a accueilli plus de 300 millions d’investissement en 2018.

A l’image de la Silicon Valley, le lieu cherche à catalyser l’entrepreneuriat dans un espace dynamique d’innovation et de partage d’idées. «Yverdon-les-Bains représente une zone stratégique: la ville est facilement accessible, à l’intersection des grandes autoroutes suisses, explique Juliana Pantet, directrice de l’Y-Parc. La région bénéficie également de la proximité des grandes écoles telles que la Haute Ecole d’ingénierie et de gestion du canton de Vaud et de l’EPFL.»

Pour le moment, l’Y-Parc compte 170 sociétés et start-up, représentant plus de 1500 emplois dont 15% dans le domaine de la santé. «Les entreprises travaillent en synergie, ce qui leur permet de trouver parmi leurs voisins leurs partenaires ou leurs futurs clients», souligne Juliana Pantet, directrice de l’Y-Parc. Cette logique a notamment récemment incité l’entreprise pharmaceutique américaine Incyte – 2 milliards de chiffre d’affaires annuel – à installer son siège social européen dans le canton et à investir 100 millions de francs dans l’agrandissement de son usine de production biologique située au sein du parc technologique yverdonnois.

De fait, intégrer l’Y-Parc fait désormais l’objet de toutes les convoitises: «Nous recevons énormément de demandes d’adhésion, détaille la directrice. Cependant, les critères d’admission du parc sont stricts, l’entreprise doit obligatoirement installer son laboratoire de R&D ou son site de production au sein du parc, et pas seulement une boîte aux lettres ou un bureau commercial.»


La santé en 2049...

«La médecine personnalisée, notamment dans le domaine de l’oncologie, n’est qu’une des émanations éclatantes de l’évolution très rapide des connaissances dans la santé», estime Benoît Dubuis. L’édition génomique pourrait ainsi devenir une réalité, afin d’inactiver ou de corriger un gène ciblé, voire d’en ajouter un. La santé s’appuiera également sur l’exploitation des données: «Grâce aux nouvelles technologies d’analyse des données, les médecins pourront passer plus de temps auprès du patient pour le soutenir avec empathie, une valeur humaine irremplaçable», estime Jurgi Camblong. Par ailleurs, «nous avons une responsabilité sociale d’anticiper les problématiques liées aux seniors», ajoute Nadia Mettraux. «La population sera plus âgée, il faudra donc trouver des méthodes de prévention pour gérer la vieillesse», dit aussi Patrick Aebischer, ancien directeur de l’EPFL, qui anticipe également que des outils d’ingénierie tendront à augmenter les capacités humaines comme l’ouïe.


«Le vieillissement est le défi numéro un de la santé»

En seize ans à la tête de l’EPFL, Patrick Aebischer a transformé l’institution en une référence de renommée internationale où convergent l’ingénierie, les nouvelles technologies et les sciences de la vie.

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Patrick Aebischer a été président de l’EPFL de 2000 à 2016.
© Regis Colombo

Lorsqu’il prend les commandes de l’Ecole polytechnique fédérale de Lausanne (EPFL), Patrick Aebischer veut renforcer la réputation de l’institution, développer les partenariats avec les entreprises et proposer davantage de cursus autour des sciences de la vie. Aujourd’hui actif dans le capital-risque, le Fribourgeois d’origine livre ses réflexions sur l’EPFL et sur le secteur de la santé qu’il a contribué à transformer.

En 1989, vous travailliez au CHUV dans la recherche médicale. Aviez-vous conscience de l’ampleur de l’évolution que le secteur allait connaître pendant les trois décennies suivantes?

Patrick Aebischer: Le domaine de la santé a totalement changé, tout s’est complexifié: les patients ont aujourd’hui des polypathologies et leur durée de vie s’est allongée. L’espérance de vie a ainsi doublé en cent cinquante ans. Le vieillissement est devenu le défi numéro un du secteur de la santé. La santé est aussi plus précise que ce qu’on imaginait à l’époque. Grâce aux progrès de la recherche, le génie génétique est désormais accessible. Il y a trente ans, nous avions déboursé 3 milliards d’euros pour le séquençage d’un être humain. Aujourd’hui le coût est évalué à moins de 1000 francs. Ainsi, nous serons bientôt tous séquencés, ce qui nous permettra de connaître nos facteurs de risque vis-à-vis de telle maladie. C’est révolutionnaire!

Vous avez durablement changé le visage de l’EPFL, notamment avec l’introduction du cursus des sciences de la vie. Pourquoi ce choix?

Il s’agit d’un cursus essentiel car nous avons besoin d’ingénieurs qui connaissent les mathématiques, la physique mais aussi la biologie. La santé actuelle a besoin de cette polyvalence entre ingénierie et physiologie. Aujourd’hui, près de 50% des recherches menées à l’EPFL concernent le domaine de la santé. On retrouve notamment la médecine des «parties de rechange», puisque plus de 50% des personnes de plus de 60 ans ont un implant de remplacement. Grâce à l’ingénierie, les médecins peuvent désormais quasiment tout changer: d’une valve cardiaque à une hanche en passant par l’appareil auditif. C’est dans ces interfaces entre cerveau, physiologie et ingénierie que l’on va observer de grandes évolutions.

De nombreuses start-up émergent de l’EPFL. Comment faire pour qu’elles restent ici?

Le principal défi réside dans notre capacité à les faire grandir en Suisse. Si nous sommes performants dans la phase de création des start-up, nous avons des lacunes dans celle de la croissance. Pour rester dynamiques, nous avons tout intérêt à les maintenir ici afin que le pays enregistre un retour sur investissement. En effet, le secteur public finance massivement la recherche. Si les start-up se pérennisent dans la région, elles vont engendrer de la valeur ajoutée en créant de nouveaux emplois, notamment.

Une solution pour les garder se trouve dans les fonds d’investissement: si les entreprises ont accès à des capitaux importants, elles pourront rester. Le processus de test clinique dans la santé est particulièrement long et onéreux. Il faut donc que nos start-up aient accès à du capital-risque puis à des fonds de croissance pour se pérenniser en Suisse.

C’est d’ailleurs votre activité principale aujourd’hui. Pourquoi cette reconversion?

Il s’agit d’un choix logique car une bonne université doit avoir un bon enseignement, une bonne recherche mais doit également être entourée de start-up émanant de cette activité de recherche. Aujourd’hui, je travaille avec NanoDimension, un fonds de capital-risque spécialisé dans le secteur de la santé. Jusqu’ici, nous avons levé 335 millions de francs de fonds et investi dans des start-up situées à l’interface de l’ingénierie et des sciences de la vie.

Je trouve que ce soutien financier au développement des entreprises manque cruellement en Suisse. Il est pourtant très important. Lorsque je présidais l’EPFL, j’ai travaillé à promouvoir des investissements en capital-risque. A mon arrivée, il s’élevait à environ 3 millions de francs. Quand je suis parti seize ans plus tard, il était passé à 300 millions, avec plus des deux tiers dans le domaine des sciences de la vie.

Les progrès technologiques soulèvent des questions éthiques et sociales. Comment abordez-vous cette problématique?

On ne peut pas arrêter le progrès technologique, mais il faut évidemment l’encadrer. Dans les questions de médecine génique, on touche à l’essence même de l’être humain. Il faut donc garder à l’esprit les considérations éthiques. Le danger serait de faire avancer la technologie jusqu’à un point de tension où la capacité sociologique, par nature plus lente, serait dépassée. Par exemple: quelles seront les conséquences du fait de vivre sur quatre, voire cinq générations? Ces problématiques sociales doivent être réinventées. Paradoxalement, les limites au développement scientifique seront sûrement davantage d’ordre sociétal que technologique. Les progrès scientifiques font également face à des problématiques de gouvernance politique. La mise en place de régulation est beaucoup plus longue que les progrès techniques.

Quels sont les principaux défis de la santé de demain?

Le vieillissement, c’est certain. Il faut se préparer au fait que la population vive plus longtemps, avec le challenge qu’elle vieillisse bien. A l’époque, avoir 40 ans, c’était vivre âgé. Aujourd’hui, ce n’est pas la moitié de l’espérance de vie. A 65 ans, je ne me sens pas encore très vieux (rires)! Aujourd’hui, la population la plus croissante est celle des centenaires. Je ne crois pas aux théories d’éternité, mais la science va nous permettre de rajouter dix à vingt ans à notre espérance de vie ces prochaines années. L’objectif est d’accompagner cette augmentation par un accroissement des capacités physiques et mentales afin d’améliorer l’état de santé, mais aussi le bien-être. Pour cela, il faut travailler sur les quatre piliers fondamentaux du vieillissement: la mobilité, autrement dit la capacité d’être indépendant, la dimension cognitive, la vision et l’audition.

Puis, la santé de demain doit impérativement passer par la prévention personnalisée. Les progrès technologiques font que nous sommes évalués en permanence, par nos montres ou nos prothèses, qui mesurent depuis notre rythme cardiaque jusqu’à notre tension, en passant par le nombre de pas, etc. Ces outils accumulent des données qui peuvent servir à une prévention qui serait d’autant plus efficace si elle était personnalisée. Par ailleurs, le vieillissement de la population risque d’augmenter encore les coûts de la santé. Il faudra donc se demander si la société est prête à consacrer 30% du PIB à ce poste, soit plus du double d’aujourd’hui.

A quoi ressemblera la santé dans trente ans?

Elle sera complètement différente, sûrement personnalisée, avec un rôle majeur joué par l’utilisation de données. Grâce aux mesures biométriques, les patients seront les premiers acteurs de leur santé. En parallèle, la technologie permettra d’augmenter les capacités humaines. Au niveau de la Suisse romande, la Health Valley devrait s’agrandir au-delà des biotechnologies et de la pharmacologie. La santé, ce n’est plus seulement une pilule qu’on ingère, mais c’est quelque chose qui passe aussi par la prévention et la stimulation psychologique. Des acteurs comme Nestlé Health Science, qui se focalise sur la nutrition, ou encore l’industrie des jeux vidéo, avec la stimulation de l’activité cérébrale, peuvent avoir un impact supplémentaire sur la santé.

A mon sens, le grand challenge du XIXe siècle sera de nourrir la technologie et le vieillissement, autant physiquement qu’intellectuellement. Nous travaillerons peut-être moins grâce aux robots, mais nous devrons alors entretenir notre cerveau. Le prochain siècle sera celui des humanités et des sciences sociales, et l’Europe à un rôle à jouer de par son riche héritage historique et culturel.


Top/Flop de l’industrie médicale

Quelles sont les entreprises/entités qui ont marqué ces trois dernières décennies? Florilège.

Top Sophia Genetics, EPFL, ADC Therapeutics, Biopôle, Nestlé Health Science, Merck Serono, Campus Biotech, Mindmaze, Incyte, Alcon, Polyphor, Okairos, Roche Glycart, Selexis, Vifor Fresenius Medical Care Renal Pharma, 1Drop Diagnostics, Cognex, Medgate.

Flop Amgen, Biocartis, l’augmentation des coûts de la santé et des primes, Swiss Medtech Industry, fermeture du Centre médico-chirurgical de Nyon.

 

DF
Dossier réalisé par Audrey Magat et Erik Freudenreich