Le biogaz serait-il une solution d’avenir pour réduire les émissions de gaz à effet de serre en Suisse? Moins médiatisé que l’énergie électrique ou l’hydrogène, il s’agit d’un combustible renouvelable, produit par fermentation de résidus organiques. Le fumier, le lisier, les boues d’épuration, les déchets et restes alimentaires issus de l’agriculture, de la production alimentaire et de la restauration sont utilisés en tant que matières premières dans ce cadre. Le méthane ainsi produit possède l’avantage d’être presque neutre en CO2. Autrement dit, la quantité de CO2 produite serait environ la même si la biomasse pourrissait sans être utilisée.

Aujourd’hui, un camion fonctionnant au gaz naturel compressé (GNC) ou au gaz naturel liquéfié (GNL) utilise habituellement 76,4% de gaz naturel et 23,6% de biogaz. Il émet déjà jusqu’à 20% de CO2 de moins qu’un véhicule diesel de même taille. «Mais si ce même camion fonctionne à 100% au biogaz, la baisse des émissions de CO2 atteint entre 75 et 85%», précise André Räss, responsable produit mobilité chez Gaznat.

De nombreuses stations-services proposent actuellement aux automobilistes de faire le plein avec du biogaz pur. Le prix à la pompe est cependant légèrement plus élevé. Pour un fonctionnement au biogaz pur, le surcoût correspond à un prix de l’essence d’environ 1,80 franc à 1,85 franc par litre. Mais ces prix pourraient évoluer à la baise si la filière du biogaz se développait en Suisse.

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Un camion Scania roulant au biogaz et exploité par Thurtrans pour les livraisons de Lidl Suisse. 

© Lidl Suisse

Potentiel indigène

C’est une perspective d’autant plus intéressante que le potentiel de production indigène est important et reste encore sous-exploité, alors même que la réserve en biomasse est pratiquement illimitée. L’étude «Biomassepotenziale der Schweiz» (Potentiels de la biomasse en Suisse) de l’Institut fédéral de recherches sur la forêt, la neige et le paysage WSL, publiée en 2017, estimait à environ 5 TWh le potentiel du biogaz issu de la biomasse en Suisse. Cela correspond à environ 15% des ventes actuelles de gaz naturel. Mais le potentiel théorique est presque deux fois plus élevé.

Les fournisseurs de gaz suisses pourraient donc tirer leur épingle du jeu, d’autant plus qu’ils font partie des pionniers de la production de biogaz: la première injection au monde de gaz renouvelable dans le réseau de gaz naturel a eu lieu en 1997 à Samstagern (ZH). Côté romand, le canton de Genève s’est très tôt investi dans la production, même si la plupart des installations se trouvent en Suisse alémanique. Notons aussi l’ouverture en 2020, à Bure, de la première station-service 100% biogaz de Suisse romande.

Gaznat

Flotte de camions IVECO roulant au GNL de la société ilo Logistics. 

© Jonas Friedrich

Exonération de la redevance poids lourds

Signe que le biogaz intéresse de plus en plus les acteurs du secteur de l’énergie, le fournisseur régional d’énergie SWG a récemment décidé d’ajouter volontairement plus de biogaz au GNC disponible à la pompe. Le plein de GNC dans le secteur de distribution de SWG contient donc désormais au moins 40% de biogaz.

Grâce à une motion déposée en 2019 par la Commission des transports et des télécommunications du Conseil des Etats, le recours au biogaz et au biogaz liquéfié (bio-GNL) permettra aussi de bénéficier d’une réduction de la redevance poids lourds liée aux prestations (RPLP). Jusqu’à présent, seuls les poids lourds à propulsion électrique étaient exonérés. «Le montant de la réduction doit encore être déterminé, mais des spécialistes pensent qu’une exonération de 20% permettrait déjà d’accroître grandement l’intérêt pour le biogaz», conclut André Räss.

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