Les sociétés fintech ont le vent en poupe et tous les médias ne cessent de parler d’elles. Mais il est encore tôt, dans ce marché innovateur, pour évaluer quels sont les réels potentiels de ce secteur. Preuve en est, deux informations parues quasi simultanément au début du mois de juin sur des sociétés fintech ont donné des images très antagonistes du domaine en Suisse.

Commençons par un indice de succès en Suisse romande. Pour la première fois en Suisse, une banque privée s’est associée à une fintech afin de proposer à ses clients de nouvelles alternatives à leurs placements. Et c’est la banque genevoise Piguet Galland qui a lancé le mouvement en se rapprochant de la plateforme européenne d’investissement en ligne Raizers.

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Equilibre fragile

«C’est un partenariat stratégique qui s’est fait naturellement. Nous sommes conscients de la transformation numérique que connaît notre société et des besoins évolutifs de nos clients. Ce partenariat avec Raizers nous permet d’intégrer de nouvelles technologies», déclare la direction de Piguet Galland.

La banque semble d’ailleurs vouloir jouer la carte des précurseurs dans les fintech. Celle-ci coorganise notamment avec Raizers des événements professionnels et ouvre ses portes aux dirigeants en recherche de financement. Elle a ainsi reçu le 7 juin dernier des entreprises en recherche de financement pour une session «pitch» durant laquelle chaque entrepreneur a eu dix minutes pour convaincre son audience. Un événement unique qui s’est révélé être un grand succès, ainsi que nous l’a expliqué Maxime Pallain, le CEO suisse de Raizers. «Nous avons fait le plein en termes de présence. Différentes entreprises se sont présentées aux investisseurs. Nous avons décidé de renouveler l’événement en septembre et à la mi-novembre, car la demande est là.»

Mais toutes les aventures des fintech ne sont pas forcément à la hauteur des attentes. Coup de tonnerre en juin, le groupe Centralway Numbrs, l’une des plus grandes fintech suisses, basée à Zurich, a ainsi décidé de supprimer 50 emplois. Pourtant la start-up était prometteuse, elle affiche une valeur qui dépasse un milliard de francs grâce au succès de sa plateforme de distribution de produits financiers. Mais l’équilibre semble fragile, car la décision des licenciements a été prise en raison de frais de personnel trop élevés, selon le site financier Finews.

Phase fintech 3.0

«La session ‘pitch’ de juin a été un succès. La preuve que la demande est là.»

Maxime Pallain CEO suisse de Raizers

Que penser alors de l’avenir et du business plan de cette entreprise lancée il y a quatre ans? Bénéficiant d’investisseurs solides, Centralway Numbrs n’affiche pas encore de revenus suffisants, elle doit donc alléger ses charges. Et le doute s’installe. Elle ne semble pas être la seule à devoir changer ses plans. En effet, selon le consultant Accenture, la réalisation des promesses des fintech se fait attendre. Le taux d’échec d’une start-up oscille même entre 50 et 80%, explique Andreas Dietrich, coauteur du rapport sur la scène fintech suisse de la Haute Ecole de Lucerne, cité dans le journal Le Temps: «Il est possible de gagner beaucoup d’argent, mais aussi de tout perdre. C’est un processus tout à fait normal.»

L’expert estime enfin que «le risque d’échec est nettement supérieur dans le B2C (produit destiné au consommateur final) que le B2B (vendu à d’autres producteurs de services) parce que le marché suisse est petit et les coûts de marketing élevés».

L’analyse finale est intéressante et donne une piste pour l’avenir des fintech. «Avec la fintech 2.0, entre 2010 et 2015, les startup ont compris la nécessité de collaborer avec les banques, en raison de leur réseau de clients, de leur marque et de leur licence bancaire. Depuis quinze mois, nous sommes entrés dans la phase de fintech 3.0, celle d’un partenariat lors du développement commun de nouvelles solutions.» Une nouvelle ère commence pour cette industrie pourtant si jeune.

EdouardBolleter
Edouard Bolleter