C’est à n’y plus rien comprendre, mais c’est la vie contrariée des bourses observée ces dernières semaines. L’envolée des marchés d’actions sur les quatre premiers mois de l’année 2019 (respectivement +16% et +17,5% à fin avril pour l’indice européen STOXX 600 et l’américain S&P 500) peut sembler paradoxale en regard du ralentissement de la croissance mondiale. En effet, dans son rapport du 6 mars, l’OCDE notait que celle-ci devrait «fléchir à 3,3% en 2019 (3,8% en 2018), l’accentuation des risques à la baisse se poursuivant». Alors, quelle conclusion en tirer et, surtout, quelle est l’attitude à suivre dans ce cas pour les investisseurs privés?

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«Plus que dans une quelconque euphorie des investisseurs, la cause est à rechercher dans le phénomène TINA, c’est-à-dire There is no alternative, nous expliquent Philippe Lang, président de Rouvier Associés Suisse, et Marc Effgen, directeur de Rouvier Associés à Lausanne. Dans le contexte de taux d’intérêt qui prévaut depuis 2015 et la fin du cycle de baisse des taux entamé en 1981, l’investissement obligataire, alternative liquide et non spéculative à l’investissement en actions, présente en effet un rendement quasi nul tant que les taux resteront bas et un risque en capital dès qu’ils remonteront. Une remontée de 1 à 3% entraînerait une perte de valeur de 9% pour une maturité de cinq ans, à 17% pour une maturité de dix ans.»

Le phénomène TINA

Dès lors qu’il n’y a pas d’alternative, comment choisir ses investissements en actions de manière à optimiser le couple rendement-risque? Les experts rappellent que l’investisseur en actions anticipe deux sources de revenus. Tout d’abord l’appréciation du capital investi dans une entreprise, qui reflète la création de richesse par celle-ci, et les dividendes attribués aux actionnaires. S’il observe sur une longue période un indice boursier tel que le S&P 500 américain, il constate que le cumul des deux sources a historiquement généré une performance annuelle de 6,7%, dont près de 3% pour les dividendes. Il constate également que la volatilité de cette performance est de 20% pour une durée de détention d’un an, mais diminue à 7,5% pour une durée de détention de sept ans et à 5% pour une durée de détention de douze ans.

«Etant donné l’horizon de placement de la plupart des investisseurs, la volatilité est donc le premier facteur de risque associé à l’investissement en actions, le second étant le risque spécifique associé au choix d’investissement (on peut penser au sort des investisseurs dans Polaroid, ou plus récemment dans Nokia, ndlr). Une fois réglé le cas du risque spécifique par une diversification appropriée de ses investissements, l’investisseur cherchant à optimiser le couple rendement-risque s’attachera à améliorer le rendement sans augmenter la volatilité et/ou à limiter la volatilité sans diminuer le rendement», note Marc Effgen.

Autre critère: la volatilité

L’appréciation du cours de bourse d’une société reflète en outre dans la durée la croissance de ses bénéfices par action. Comment faire ensuite sa sélection? «On recherchera en priorité des sociétés à rentabilité élevée et pérenne leur permettant d’investir dans une croissance supérieure à la moyenne. Elles présentent le plus souvent les caractéristiques communes des sociétés de qualité: détenant un avantage concurrentiel durable et défendable, elles sont leaders sur leur marché dont elles sont le consolidateur naturel, cumulant croissance organique et acquisitions.»

Autre critère important, la volatilité, c’est-à-dire la fluctuation du cours de bourse autour de sa tendance à long terme, reflète quant à elle les aléas économiques des sociétés (évolution des bénéfices) et psychologiques des marchés (évolution des multiples de bénéfices ou PE). Au sein de chaque secteur d’activité, les sociétés de qualité sont souvent les plus récurrentes et affichent une volatilité plus faible en même temps qu’une valorisation plus soutenue.

Les «best in class» se distinguent donc par un rendement supérieur à la moyenne. Et une volatilité contenue. «Nestlé, qui est un bon exemple de «vache à lait», affiche un retour sur fonds propres de 22%, réinvesti à 25% pour financer une croissance de 5,5% et distribué à 75% pour un rendement de 3,4%. Son appréciation boursière a fluctué autour d’une tendance de 5,5%, soit 9% dividendes compris avec une volatilité de 11%. Dassault Systèmes, leader mondial des logiciels de conception et bon exemple d’«étoile», a un retour sur fonds propres de 18%, réinvesti à 75% pour financer une croissance historique de 13,5% et distribué à 25% pour un rendement de dividende inférieur à 1%. Son appréciation boursière des quinze dernières années a fluctué autour d’une tendance de 14% par an, soit 15% dividendes compris avec une volatilité de 22%», donnent comme exemples les analystes de Rouvier Associés.

L’investisseur en actions avisé composera donc un portefeuille comme une entreprise compose son portefeuille d’activité. S’il veut déléguer cet effort, il recherchera un fonds de placement collectif de capitaux reposant explicitement sur le double critère de la recherche de qualité au juste prix et d’une volatilité contenue.


Gestion active ou passive?

  • Face aux incertitudes, quelle est l’attitude à adopter? Les professionnels institutionnels privilégient une gestion active pour atteindre leurs objectifs de rendement malgré la volatilité et l’incertitude sur les marchés. Seule la hausse des taux d’intérêt fait peur. En effet, selon une enquête mondiale de Natixis Investment Managers, plus de huit sélectionneurs de fonds professionnels sur dix (82%) estiment que pour atteindre leurs objectifs de rendement, ils vont privilégier la gestion… active.
  • Les principaux facteurs de risque identifiés sont la hausse des taux d’intérêt, la volatilité et les bulles de marché. Plus concrètement, un peu moins de la moitié (44%) des sélectionneurs ont l’intention de réduire leur allocation aux actions américaines. En outre, 39% d’entre eux ont indiqué qu’ils prévoyaient d’accroître leur exposition aux marchés émergents en 2019. Les sélectionneurs de fonds s’attendent à ce que les secteurs de la finance, de la santé et des technologies de l’information surperforment, contrairement au secteur des matières premières.
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Edouard Bolleter