Les premiers chiffres conjoncturels confirment le choc. Et les économistes le savent, plus un système de production est arrêté longtemps, plus le redémarrage est dur. Rapidement, et de manière pragmatique, des mesures ont été prises par la Confédération, les cantons, ainsi que par des acteurs privés comme les banques, pour tenter de limiter les conséquences de cette situation exceptionnelle sur le tissu économique. Afin que, une fois passé le pic de la pandémie, la reprise de l’activité puisse se faire au bénéfice du plus grand nombre. L’efficacité de la voie suisse – permettre aux entreprises touchées d’avoir recours, via le secteur bancaire, à des crédits transitoires – a même été louée par le Financial Times.

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Dans un premier temps, l’urgence a été d’assurer que les entreprises aient suffisamment de cash pour honorer leurs dépenses courantes. Une fois encore, l’adage s’est révélé juste: cash is king, l’argent est le nerf de la guerre. Ensuite, les entrepreneurs ont dû s’atteler à une tâche gigantesque: se projeter vers demain, anticiper leur sortie de crise. En d’autres termes, réfléchir à comment leur entreprise pourra fonctionner durant les deux, quatre, voire douze prochaines semaines suivant différents scénarios. Et cela sans aucune visibilité.

Une situation unique

Comment établir un plan de trésorerie alors que l’on ne sait pas comment va évoluer la pandémie? Va-t-on récupérer tout ou une partie du chiffre d’affaires après la crise? Dans quel ordre faut-il payer les fournisseurs et dans quels délais? Dans quelle mesure le cash-flow pâtira de la récession annoncée? Le free cash-flow sera-t-il dès lors suffisant pour assurer le service de la dette? La couverture des risques de change est-elle encore adaptée? Quels effets une restructuration aurait-elle sur les liquidités?

Les réponses à ces questions tendent vers le même but: adapter l’entreprise pour qu’elle puisse repartir le jour venu, et cela le plus agilement possible. Afin d’éviter la situation tragique qui la verrait tomber par défaut de rentabilité à moyen terme, après avoir évité un problème de liquidité à court terme. Un exemple? La question à se poser lors de la sollicitation d’un prêt n’est pas tant de savoir quel sera le coût de l’argent, mais bien à quoi il va servir, quelle valeur il va apporter à l’entreprise sur la durée et comment il sera remboursé.

Déjà difficile en temps normal, la quête de solutions est compliquée par le fait que le contexte ne sera pas le même que celui qui prévalait jusqu’à fin février. La situation actuelle est unique. La crise n’est pas financière, mais d’origine pandémique. Ainsi, lorsqu’il s’agit de dresser ce plan de liquidités vital pour guider l’entreprise au cours des semaines et des mois à venir, le passé ne sera pas forcément d’un grand secours.

Des outils d’aide

Cette gestion de la durée de la crise rappelle de manière brusque ce que signifie être entrepreneur, ce qu’est le risque entrepreneurial. De nombreux outils existent pour l’aider. Il peut aussi compter sur ses partenaires financiers ou fiduciaires. Des professionnels qui peuvent, par exemple, lui faire partager des expériences rencontrées dans l’exercice quotidien de leurs fonctions. Chaque entreprise est un cas différent et toute décision revient in fine à l’entrepreneur, mais le fait de savoir que telle société a modifié sa ligne de production pour répondre à la pénurie d’un produit, que telle autre a adapté sa structure, voire qu’une autre encore a hiérarchisé de manière originale ses créanciers, peut l’aider à réfléchir.

En attendant que soit levée la grande inconnue du moment – comment l’activité reprendra-t-elle? –, une autre notion essentielle pour les entreprises est, elle, connue: agir tôt dans une situation de crise améliore les chances de pouvoir naviguer vers des eaux plus calmes.

Exergues:

- «Agir tôt améliore les chances de pouvoir naviguer vers des eaux plus calmes.»

- «Un rappel brusque de ce que signifie être entrepreneur.»

PB
Pierre Palley, Responsable PME, à la BCV