Pour leur troisième tour de financement en 2019, les fondateurs de Lunaphore se sont fixé comme objectif de lever 25 millions de francs de capital. Mais les investisseurs, y compris les fonds actifs à l’échelle mondiale, se sont étonnés d’une somme aussi raisonnable. Cette approche leur semblait trop prudente. Certains d’entre eux pensaient même qu’il serait possible de doubler le montant des nouveaux fonds.

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C’est que les investisseurs sont confiants concernant le potentiel du spin-off de l’EPFL. La société a créé un dispositif qui permet d’automatiser les examens tissulaires. Ce procédé sert notamment dans le cadre la médecine personnalisée, un secteur promis à un bel avenir. Fondée par Ata Tuna Ciftlik, Diego Gabriel Dupouy et Déborah Heintze en 2014, l’entreprise a réussi à améliorer le processus de détection des cellules cancéreuses. Les appareils sont basés sur une toute nouvelle technologie qui repose sur ce qu’on appelle les microfluides. Alors qu’ils prenaient auparavant plusieurs heures, les examens tissulaires ne durent plus que dix à trente minutes. Les chirurgiens, par exemple, peuvent obtenir des informations sur le type de tumeur cancéreuse et sa répartition dans l’organisme pendant une opération.

Bâtir la confiance

Appelé LabSat, le premier produit Lunaphore a été lancé sur le marché en 2019. Et depuis, c’est pour l’équipe une course permanente dans les laboratoires situés à l’EPFL Innovation Park. «Jusqu’à présent, on travaillait sur un projet de recherche et développement. Mais la teneur du travail a complètement changé», déclare Ata Tuna Ciftlik. Pour faire face à une phase de forte croissance, l’entreprise de 30 employés doit jongler en même temps avec la chaîne d’approvisionnement, la distribution et les relations avec les clients. Le temps où les trois fondateurs participaient à toutes les réunions externes est révolu. Le nombre de séances a explosé. «Afin de diffuser plus largement le savoir-faire, nous avons dû, en peu de temps, créer de nouvelles fonctions qui n’avaient jamais existé auparavant.»

Les instruments de Lunaphore sont fabriqués en Suisse par des entreprises spécialisées. Quinze appareils seront vendus en 2019. Pour la mise en service, ce n’est pas le nombre d’instruments livrés qui est déterminant, mais le profil de l’acquéreur. Selon Ata Tuna Ciftlik, les premiers acheteurs sont des «leaders d’opinion». Au fur et à mesure que la marque se déploie, l’intérêt grandit chez les clients potentiels – principalement des instituts de recherche et des hôpitaux universitaires – et aussi chez les partenaires commerciaux possibles. En tant que jeune entreprise, Lunaphore doit avant tout instaurer la confiance. C’est pourquoi il lui faut s’assurer la collaboration de partenaires bien établis, soit des entreprises fortes de milliers d’employés avec un chiffre d’affaires de plusieurs milliards de dollars.

Intenses négociations

Avec des partenaires de grande taille, une jeune entreprise ne risque-t-elle pas de souffrir d’un rapport de force inégal? «Si vous êtes vraiment important au niveau stratégique, tout se passe très bien, même si les intérêts ne sont pas nécessairement les mêmes», reconnaît Ata Tuna Ciftlik. D’intensives négociations portent sur les aspects financiers, les conditions commerciales et surtout sur les délais. «Quand il s’agit de timing, il y a une grande différence de capacités entre petites et grandes compagnies.»

Lunaphore travaille déjà sur une nouvelle génération de produits qui sera lancée en 2021. Le nouvel instrument devrait offrir aux clients toute une série d’avantages supplémentaires. Autant d’améliorations qui contribuent de manière significative à la création de valeur ajoutée. Ata Tuna Ciftlik fait la comparaison avec l’achat d’un ordinateur. Avec ses nouveaux instruments d’analyse, Lunaphore offrira non seulement du matériel, mais aussi des solutions complètes incluant des logiciels et des périphériques.

Où en est aujourd’hui Lunaphore, après son démarrage foudroyant? La CEO, Ata Tuna Ciftlik, se réjouit: «Ce n’était que le début. Depuis la mise sur le marché de notre premier instrument, nous avons bénéficié des retours de nos clients et notre courbe d’apprentissage ne cesse de s’accélérer.»


4 questions à Ata Tuna Citflik

  • Quel a été votre premier emploi rémunéré?
    Pendant mes études, j’ai donné des cours privés à des gymnasiens en mathématiques et en physique.
  • Que faites-vous pour le climat?
    Je n’ai jamais eu de voiture.
  • Comment entretenez-vous votre forme physique?
    Je cours 10 à 20 kilomètres par semaine et je fais des courses de trail.
  • Quel luxe vous accordez-vous?
    En tant que patron, je m’autorise à m’éloigner du bureau. Je travaille parfois dans des cafés où je me sens bien.

  • Lunaphore Technologies, Lausanne
  • Secteur: medtech
  • Fondation: 2014
  • Collaborateurs: 30
  • Contact: www.lunaphore.com

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PD
Par Jost Dubacher