"Truss se bat pour sa survie", titrait samedi The Times. "Truss s'accroche au pouvoir" affichait en Une le Daily Telegraph, le journal conservateur affirmant que des parlementaires Tories cherchent toujours un moyen de l'écarter de la tête de l'exécutif. Pour le Daily Mail, la journée de vendredi a vu "le chaos, la confusion et les volte-face atteindre des extrêmes inédits".

S'exprimant publiquement pour la première fois depuis sa nomination vendredi, le nouveau ministre des Finances Jeremy Hunt a affirmé samedi sans détour que "des erreurs ont été faites" par la Première ministre Liz Truss et son prédécesseur au ministère des Finances Kwasi Kwarteng, limogé la veille en pleine crise économique, qui a tourné à la crise politique au sein du parti conservateur. "La Première ministre l'a reconnu et c'est pour cela que je suis là", a-t-il ajouté sur la chaîne de télévision Sky news.

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Hausses d'impôts

Ce proche de Rishi Sunak, l'ancien ministre des Finances de Boris Johnson et adversaire de Liz Truss dans la campagne pour Downing Street, a pour mission de reprendre en main le mini-budget annoncé le 23 septembre et très mal accueilli par les marchés, une bonne partie du parti conservateur et la population britannique.

"Cela va nécessiter des décisions très difficiles", a prévenu M. Hunt, qui s'apprête ainsi à abandonner de nombreuses promesses de campagne de la Première ministre. Il a notamment annoncé que "les dépenses n'augmenteront pas autant que les gens le voudraient", que "certains impôts ne seront pas réduits aussi vite que les gens le voudraient", et que d'autres "augmenteront", allusion notamment à la nouvelle concession annoncée vendredi par Liz Truss.

La Première ministre a dû renoncer à conserver le taux d'impôt sur les sociétés à 19%, se résignant à l'augmenter à 25%, comme prévu par le précédent gouvernement conservateur. Il y a deux semaines, elle avait déjà dû abandonner une baisse d'impôt pour les ménages les plus riches face à la bronca suscitée par cette mesure.

La nomination de Jeremy Hunt doit permettre autant de rassurer les marchés, que de calmer la fronde chez les Tories. Une de ses premières actions comme nouveau ministre a été de s'entretenir avec Andrew Bailey, le gouverneur de la Banque d'Angleterre, qui a dû agir en urgence pour calmer les marchés après la présentation du mini-budget.

Liz Truss affaiblie

Jeremy Hunt apparaît désormais comme l'homme fort du gouvernement, selon les médias britanniques, quand la Première ministre Liz Truss est considérablement affaiblie par ses revirements. Et sa conférence de presse vendredi n'a pas convaincu.

Après sa prise de parole, les marchés continuaient de punir la livre sterling et le coût de la dette britannique est remontée légèrement vendredi, au moment aussi où la Banque d'Angleterre cessait son action d'urgence.

Une épée de Damoclès pour de nombreux ménages britanniques qui ont des crédits immobiliers à rembourser. Cinq millions d'entre eux pourraient avoir à rembourser 5100 livres (5733 francs) de plus par an d'ici la fin 2024 avec la hausse des taux d'intérêt, selon une étude du think tank The Resolution Foundation publiée samedi.

"Chaos grotesque"

Pour le Financial Times, Liz Truss a sacrifié Kwarteng "dans un pari pour sauver" sa tête à Downing Street mais "la seule chose qui unit le parti (conservateur) est le manque de confiance en Truss". Vendredi, la Première ministre avait éludé les questions sur son sort personnel, martelant qu'elle restait "absolument déterminée" à déployer sa politique.

"Je me sens trompé, totalement trompé", a estimé sur la BBC le député conservateur Christopher Chope, jugeant Liz Truss "en totale opposition avec tout ce qu'elle avait soutenu lors de son élection". Mais dans son camp, on agite aussi le spectre d'une défaite cuisante à ceux des conservateurs qui seraient tentés de provoquer des élections générales, au moment où l'opposition travailliste caracole en tête des sondages.

Le chef du Labour, Keir Starmer a d'ailleurs fustigé samedi le "chaos grotesque" engendré par le gouvernement conservateur. "Toutes les difficultés qu'affronte notre pays aujourd'hui sont de sa responsabilité", a-t-il insisté.