La stratégie climatique à long terme de la Suisse vise une réduction d'au moins 40% des émissions de gaz à effet de serre (GES) issues de l'agriculture à l'horizon 2050, relève le rapport de la Commission fédérale d'éthique pour la biotechnologie dans le domaine non humain (CENH) présenté lundi à Berne.

Cet objectif est inférieur à celui imposé à d'autres domaines, ce qui confère à l'agriculture un "statut spécial" injustifiable d'un point de vue éthique, critiquent les auteurs. L'agriculture doit faire davantage d'efforts pour devenir plus "verte".

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Nouvelles méthodes

Il s'agit notamment de développer des méthodes de production qui puissent faire face à la "volatilité climatique", soit l'alternance imprévisible entre une sécheresse extrême et des précipitations exceptionnelles. La CENH "n'exclut pas" que les biotechnologies appliquées à la sélection végétale puissent contribuer à l'adaptation des plantes aux changements climatiques. Mais leur potentiel est difficile à évaluer pour l'instant.

L'urgence climatique est telle qu'il serait imprudent de trop miser sur la génomique ou les technologies d'émission négative (NET) de compensation. Les NET, relève le rapport, suscitent des "réserves légitimes" quant à la rapidité de leur développement.

Moins d'animaux, moins de viande

Les auteurs estiment donc qu'il faut d'abord recourir à des moyens éprouvés, à savoir "réduire considérablement le nombre d'animaux de rente à l'échelle mondiale et nationale". Il convient aussi de cultiver davantage de végétaux destinés à l'alimentation humaine et de réduire la consommation de viande et de lait.

Quoi qu'il en soit, "il ne semble pas possible" de réduire à zéro les émissions de GES, même en renonçant complètement à la détention des animaux de rente et à l'importation de produits d'origine animale, préviennent les experts. Les engrais et l'exploitation des sols entraîneront en effet toujours des émissions résiduelles, qui devront être compensées par des NET si l'on veut atteindre l'objectif "zéro net".

Critiques de l'USP

L'Union suisse des paysans (USP) se montre très critique sur ce rapport. Les experts donnent des recommandations à courte vue: la réduction du nombre de têtes de bétail ne sert à rien pour le climat si la consommation elle ne change pas. On fait de l'agriculture un bouc émissaire.

Durant les 40 dernières années, le cheptel a diminué de 20% et le nombre de bovins d'un quart, rappelle l'USP sur Twitter. L'agriculture ne représente que 15% des émissions de gaz à effet de serre. Il est dommage que la commission fasse de la politique. Cela affaiblit sa position, selon l'USP.

Sélecteurs végétaux mécontents

L'association "Les variétés de demain" ne partage pas non plus la position de la commission qui dénie le potentiel des nouvelles sélections végétales pour une agriculture durable. Elle regrette encore plus que les experts aient renoncé à une évaluation éthique, a-t-elle indiqué lundi dans un communiqué.

Les milieux de la recherche du monde entier sont d'avis que les nouvelles techniques de sélection font partie des mesures efficaces pour s'adapter aux changements climatiques. Elles permettent de modifier le patrimoine génétique des plantes de manière simple et précise, sans pour autant introduire des gènes étrangers.

L'association "Les variétés de demain" demande au Conseil fédéral de présenter d'ici 2024 une proposition de réglementation pour les nouvelles méthodes de sélection végétale. Elle compte parmi ses membres les détaillants Migros, Coop Denner et des associations comme les paysans bernois, Fruit-Union Suisse ou les producteurs de céréales.

A
ats