Des variétés nécessitant moins de pesticides, plus résistantes à la sécheresse ou aux maladies, pauvres en gluten... Appelées en anglais NBT ou NGT, une kyrielle d'outils visent à "éditer" le matériel génétique des plantes sans ajout extérieur, à la différence des OGM traditionnels "transgéniques" introduisant un gène d'une espèce différente.

Pour Bruxelles, ces techniques émergentes permettraient de développer des cultures mieux adaptées au changement climatique et plus productives, mais les règles drastiques encadrant les OGM (longue procédure d'autorisation, traçabilité, étiquetage, surveillance...) apparaissent "inadaptées".

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La proposition de la Commission prévoit donc que la réglementation OGM ne s'applique plus aux semences et produits issus de NGT et présentant des modifications susceptibles de se produire naturellement ou via des croisements traditionnels, selon un projet du texte consulté par l'AFP.

Nombreuses demandes

Sous réserve d'un nombre limité de mutations, ils seraient considérés comme "équivalents" aux variétés conventionnelles et enregistrés dans une base publique, avec l'obligation d'étiquetage spécifique seulement pour les semences.

Pour autant, aucun produit NGT ne pourrait être labellisé "bio", selon cette proposition qui sera discutée par les Etats membres et eurodéputés.

Toutes les autres variétés NGT, jugées non équivalentes aux variétés conventionnelles, resteraient soumises au régime encadrant les OGM, avec des aménagements - l'obligation de prévoir une méthode de détection pour chaque semence créée pourrait être levée.

Bruxelles recense actuellement 90 demandes d'autorisation pour des cultures NGT dans l'UE, encore au stade de la recherche, avec seuls quelques tests en plein champ (maïs en Belgique, pommes de terre en Suède...).

Pour accélérer leur commercialisation, la simplification des règles est réclamée par la puissante organisation agricole Copa-Cogeca, une partie des Etats membres et les eurodéputés du PPE (droite).

"Apprentis sorciers"

Au niveau des Etats, l'Espagne, qui assure la présidence tournante de l'UE, veut négocier de concert la législation NGT et un autre texte imposant des objectifs de réduction des pesticides, sur lequel les discussions s'enlisent en raison d'inquiétudes pour les rendements.

C'est aussi la position de Renew (centristes et libéraux) au Parlement européen. "On ne peut pas atteindre les objectifs du Pacte vert", la baisse des produits phytosanitaires, "sans des outils alternatifs qui changent la donne" pour continuer à produire autant, observe l'eurodéputée Irène Tolleret.

Elle appelle cependant à un débat sur l'encadrement de la propriété intellectuelle.

A l'inverse, une partie des eurodéputés de gauche sont hostiles à toute "dérégulation" et réclament que les NGT restent soumis à la réglementation OGM, conformément à une décision rendue en 2018 par la Cour de justice de l'UE.

"Il ne faut pas jouer aux apprentis sorciers. Je suis un farouche adversaire de la mise en culture sans évaluation complète et indépendante, sans traçabilité, ni information réelle des consommateurs", insiste l'élu socialiste Christophe Clergeau, s'inquiétant des effets sur les interactions complexes d'une plante avec son environnement.

"Mauvaise réponse"

Pour l'ONG BeeLife, "il serait irresponsable de commercialiser ces nouveaux OGM sans connaître l'impact" hors des laboratoires pour les abeilles et la biodiversité.

Pour ses détracteurs, l'édition génomique est loin d'avoir fait ses preuves.

"On fait fausse route, on bâtit sur des promesses illusoires", au risque d'effacer "la grande diversité génétique" que les agriculteurs développent localement à force de croisements traditionnels et d'accroître la dépendance des cultivateurs aux semenciers, face à la multiplication des brevets sur le vivant, s'alarme l'eurodéputé Benoît Biteau (Verts).

Pour l'ONG Friends of the Earth, les NGT répondent mal au défi de conditions climatiques changeantes et imprévisibles, qui imposent au contraire de "maximiser la diversité" en adaptant localement les variétés.

Autre point sensible, l'absence d'étiquetage sur les aliments commercialisés issus de plants NGT: l'association Foodwatch dénonce un "immense recul (...) qui priverait les consommateurs de leur droit à savoir ce qui est dans leur assiette".