Initiée par le régulateur français de l'audiovisuel et du numérique, l'Arcom, cette procédure a déjà connu plusieurs retards. Elle est notamment encouragée par plusieurs associations de protection de l'enfance et soutenue par le gouvernement.

Désormais, les regards se tournent vers le Conseil d'Etat. Des recours ont été déposés fin 2021/début 2022 auprès de cette instance par deux des éditeurs concernés (Webgroup Czech Republic qui édite Xvideos.com et NKL Associates qui édite Xnxx).

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"Sécurité juridique"

Un décret publié quelques mois plus tôt stipule qu'ils ne peuvent s'exonérer de leurs responsabilités vis-à-vis des plus jeunes avec une simple déclaration de majorité. Selon ces entreprises, ce texte méconnait le "principe de sécurité juridique", car il ne précise pas les mesures à mettre en place pour contrôler l'âge des visiteurs tout en assurant le respect de leur vie privée.

Ils pointent également un "défaut de notification préalable de la législation" à la Commission européenne, censée examiner les textes susceptibles d'imposer des mesures restrictives à des sociétés situées dans l'UE.

"Victoire du droit"

L'instruction de ces recours est toujours en cours par le juge administratif mais aucune date d'audience n'est prévue, a indiqué l'avocat des deux éditeurs, Karim Haeri. Selon lui, le report de la décision du tribunal judiciaire est "une victoire du droit".

"Nous n'avons cessé de dire depuis 18 mois que le gouvernement et l'Arcom ont manqué à leurs obligations légales les plus élémentaires, que (la loi sur les violences conjugales de juillet 2020) était mal faite, imprécise et lacunaire", a-t-il ajouté.

S'ils étaient obligés de vérifier l'âge de leurs visiteurs, les cinq sites visés estiment leur perte d'audience à "90-95%", selon un message posté vendredi sur le site XVideos.

Dans un communiqué, l'Arcom a pris acte de la décision et assuré qu'il "continuera d'oeuvrer au respect par les éditeurs de sites pour adultes de leurs obligations légales". "Des solutions existent pour limiter l'exposition des mineurs à la pornographie. Il revient aux sites éditeurs ou hébergeurs de les mettre en oeuvre", a appuyé vendredi la secrétaire d'Etat à l'enfance, Charlotte Caubel.

Associations fâchées

Thomas Rohmer, directeur de l'association Open spécialisée dans la "parentalité numérique", s'est dit pour sa part "en colère" et il a dénoncé "une décision incompréhensible d'un point de vue juridique (qui) ressemble à un déni de justice".

"La justice a l'air de protéger ces sites porno et ne protège pas les mineurs", a renchéri Justine Atlan, de l'association e-Enfance.

La situation devrait encore évoluer avec l'examen à la rentrée du projet de loi sur la régulation du numérique, porté par le ministre du secteur, Jean-Noël Barrot, et adopté par le Sénat. Il permet à l'Arcom de se passer du juge.

Deux millions de mineurs par moisLe régulateur a également mis en demeure trois nouveaux sites, dont YouPorn, et lancé une procédure judiciaire à l'encontre de deux autres plateformes.

Selon une étude de l'Arcom, plus de deux millions de mineurs sont exposés chaque mois à des contenus pornographiques en France. Même en cas de blocage par les opérateurs télécoms, il serait possible de le contourner grâce à des solutions techniques déjà existantes, comme un VPN.

Le sujet dépasse les frontières hexagonales: le Royaume-Uni veut lui aussi mieux filtrer l'accès aux sites porno, avec son projet de loi sur la sécurité en ligne, en discussion au Parlement. Aux Etats-Unis, plusieurs Etats ont intégré dans la loi une vérification de l'âge des internautes.

En France, une solution technique reposant sur un tiers de confiance a été présentée mais reste en phase de test. La Cnil, gardienne des données personnelles, s'est déclarée favorable à des solutions transitoires comme la validation de l'âge par la carte de paiement ou l'analyse des traits du visage.

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SDA