En 2024, le producteur de l'emblématique couteau de poche suisse compte notamment développer davantage sa division horlogerie.
«La vente de nos produits a généré des recettes de 429 millions de francs cette année», confie à l'agence AWP le directeur général Carl Elsener, dans une salle de réunion du siège d'Ibach donnant vue sur les montagnes schwytzoises. Il s'agit d'une très légère amélioration par rapport aux 426 millions de 2022.
«Mais nous engrangeons également des recettes à partir des travaux de réparation et des licences pour certains produits de la marque Wenger qui ne sont pas comprises dans ce montant», précise celui qui représente la quatrième génération aux commandes de l'entreprise fondée en 1884.
Le groupe familial, qui détient des sites de fabrication à Ibach, dans le canton de Schwytz mais également à Delémont, au Jura, a légèrement accru ses recettes grâce au dynamisme de ses couteaux de poche et de son offre de bagages.
«On sent clairement que le tourisme et les activités en plein air ont repris», commente le dirigeant. Le groupe avait été touché de plein fouet par la pandémie en 2020 lorsque les flux de touristes avaient quasi tari et les magasins fermés au plus fort de la crise sanitaire. Victorinox comme nombre d'entreprises avait dû recourir à ses économies et au chômage partiel pour faire face à cette période difficile.
«Cette année, tous les marchés ont observé une croissance à l'exception des Etats-Unis, notre principal débouché», fait remarquer M. Elsener.
La contre-performance des Etats-Unis, attendue selon Victorinox, s'explique par les activités de repositionnement en cours. Le groupe ferme ses points de vente les moins satisfaisants et rachète en partie les stocks.
«Dans le passé, la quantité a parfois primé sur la qualité et maintenant nous rectifions le tir», indique celui qui dirige l'entreprise depuis 2007. «Un redécollage des Etats-Unis devrait avoir lieu d'ici deux à trois ans», espère-t-il.
Une réduction du réseau de vente, qui comprend plus de 20'000 magasins gérés essentiellement par des détaillants indépendants, se poursuit par ailleurs dans toutes les régions.
Marges inférieures à 2019
Si le coutelier a pu redressé la barre au niveau des recettes après la difficile période liée à la pandémie, les marges n'y sont pas encore. L'inflation et la forte valorisation du franc par rapport à d'autres devises pèsent sur la rentabilité.
«Mais nos marges sont saines et durables», assure le sexagénaire, tout en relevant que l'environnement conjoncturel exige une optimisation continuelle de la production.
Quelque 135'000 couteaux, y compris ceux destinés pour la cuisine, sortent de l'usine chaque jour, ce qui représente 30 millions de pièces chaque année. A Ibach on peut par ailleurs suivre étape par étape comment des rouleaux d'acier passent dans diverses machines et sont transformés en couteaux à usage civil ou militaire, sous l'oeil attentif des collaborateurs.
L'assortiment couteau contribue à environ 70% des recettes du groupe, tandis que les bagages, montres et parfums génèrent les 30% restants.
Les montres produites à Delémont, dégageant environ 10% des ventes totales, ont souffert ces dernières années de la concurrence des smartwatches, mais M. Elsener met en exergue un redressement progressif des affaires grâce à un changement de stratégie. «Nous avons revu nos collections et donné un design propre à nos montres, ce qui les rend plus facilement reconnaissables. Et les ventes se développent de nouveau positivement.»
C'est aux Etats-Unis que Victorinox attend d'ici deux à trois ans le plus grand impact positif au niveau de l'horlogerie. L'Amérique latine affiche quant à elle déjà une bonne croissance, entre autres grâce à la solide demande observée au Mexique et du Brésil.
La Chine reste cependant un marché difficile pour les garde-temps Victorinox. «Ce sont les couteaux de poche et les bagages qui marchent bien dans ce marché.»
«Même si nous nous trouvons un segment horloger qui est plutôt en repli, je pense que nous pouvons à moyen terme enregistrer une croissance grâce à nos produits présentant un bon rapport qualité-prix». Actuellement, le prix moyen des garde-temps varie entre 350 et 750 francs.
Nonobstant les défis actuels, Carl Elsener se montre positif pour 2024 et Victorinox, comptant plus de 2100 employés, devrait continuer à croître. «Nous mettrons l'accent sur les Etats-Unis, la Suisse et l'Allemagne», résume le patron, tout en complétant qu'au niveau des produits ce sont l'horlogerie et les couteaux de poche qui seront sur le devant de la scène, à l'exception de l'Asie où ce sont les bagages et non les montres qui devraient soutenir les résultats.