Il s'agit de l'incident le plus grave depuis le début samedi dernier de ces protestations au caractère inédit, impulsées par ce mouvement fort de plus de 150'000 membres sur sa page Discord, et qui se présente comme un groupe de «jeunes libres» sans affiliation politique.

Dans ses rassemblements, GenZ 212 (comme l'indicatif téléphonique du Maroc) scande des slogans tels que «Nous ne voulons pas la Coupe du monde, la santé est prioritaire» ou «le peuple veut la santé et l'éducation», dans un pays marqué par de fortes inégalités territoriales et entre les systèmes public et privé.

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Le royaume, qui coorganisera la Coupe du monde 2030 avec l'Espagne et le Portugal et accueillera la Coupe d'Afrique des nations (CAN) fin 2025, a engagé de vastes chantiers d'infrastructures: construction de nouveaux stades, extension du réseau à grande vitesse et modernisation de plusieurs aéroports.

Une première mobilisation avait eu lieu à la mi-septembre à Agadir, après la mort de huit femmes enceintes à l'hôpital public local où elles avaient été admises pour des césariennes. Cet événement avait déclenché une série de manifestations sporadiques dans d'autres villes, avant les premiers grands rassemblements organisés par GenZ 212 le week-end dernier.

Manifestations pacifiques

Pour sa sixième journée consécutive de mobilisation, «GenZ 212 annonce que des manifestations pacifiques seront organisées aujourd'hui, dans le cadre d'une expression civilisée et responsable de nos revendications».

Les rassemblements auront lieu de 17h00 à 20h00 dans 13 villes marocaines, a précisé sur Discord le collectif apparu récemment sur les réseaux sociaux.

Mercredi soir, deux personnes ont été tuées par des gendarmes alors qu'elles tentaient de prendre d'assaut une brigade locale à Lqliaâ, près d'Agadir (sud), après avoir incendié un véhicule et le bâtiment de la brigade, ont indiqué les autorités locales.

Les assaillants cherchaient à y pénétrer pour s'emparer de «munitions et d'armes de service», selon les autorités.

Des actes de vandalisme ont également secoué d'autres villes, à l'image de Sidi Bibi, toujours près d'Agadir, où des personnes ont incendié des bureaux de la municipalité, selon des médias locaux.

A Salé, ville jumelle de Rabat, des individus cagoulés ont mis le feu à deux voitures de police et à une agence bancaire, sans scander de slogans, a constaté un journaliste de l'AFP.

«Fin de la corruption»

Composé de jeunes nés entre la fin des années 1990 et le début des années 2010, le collectif se décrit comme un «espace de discussion» sur des questions «comme la santé, l'éducation et la lutte contre la corruption». Il affirme agir par «amour de la patrie et du roi» Mohammed VI mais se dit opposé aux partis politiques traditionnels.

Pour la première fois, les autorités ont autorisé ces manifestations mercredi soir.

Elles ont rassemblé des centaines de jeunes dans la capitale économique Casablanca (ouest) et les grandes villes de Tanger et Tétouan (nord), derrière des slogans comme «Le peuple veut la fin de la corruption» ou «Liberté, dignité et justice sociale».

«Nous assurons l'opinion publique et les autorités que nos manifestations seront entièrement pacifiques», a précisé jeudi GenZ 212, indiquant «rejeter toute forme de violence, de vandalisme ou d'émeute» et exhortant les manifestants «à respecter le caractère pacifique» du mouvement.

Mardi, des manifestations interdites par les autorités avaient donné lieu à de premiers heurts avec les forces de l'ordre notamment à Oujda (est) et Inzegane (sud), faisant près de 300 blessés, surtout au sein des forces de l'ordre et débouchant sur plus de 400 interpellations.

Depuis samedi à Rabat, des centaines de jeunes ont été interpellés un par un avant d'être relâchés pour leur grande majorité, selon l'Association marocaine des droits humains.

Un total de 134 personnes, dont six restées en détention, doivent toutefois être jugées prochainement dans la capitale marocaine.