Il y a des prises de fonctions plus difficiles émotionnellement que d’autres. Le Vaudois Yohan Bugnon en sait quelque chose. Après avoir nourrit longtemps dans un coin de sa tête l’ambition de diriger une entreprise, le père de deux enfants se retrouve subitement en haut de la pyramide hiérarchique de l’entreprise familiale qui l’emploie. C’était en 2018. Yohan Bugnon a à peine 33 ans. Mais ce qui devait être la consécration d’une jeune carrière se transforme en baptême du feu. 

Le nouveau directeur général de Sanoline, active dans le textile, hérite en effet d’une entreprise en pleine restructuration et joue très vite les pompiers pour éteindre les incendies: «Les six premiers mois ont été les plus compliqués, se souvient Yohan Bugnon. Il fallait faire des choix et mettre des priorités. On parlait tout de même d’une entreprise centenaire de plus d’une soixantaine de collaborateurs.» Celui qui se voyait bouger les choses se retrouve à sauver les meubles.» Si certaines de ses certitudes sur la fonction volent en éclats, d’autres s’imposent: «J’ai compris qu’un bon patron doit donner l’exemple par l’expertise; remettre si nécessaire les choses dans la bonne direction et donner confiance.»

«J’ai donc licencié les collaborateurs, mais je l’ai fait à l’instinct; avec empathie, malgré le contexte et les conditions.»

 

Il en faudra, car les crises s’enchaînent. Avec la pandémie, l’année 2020 sera horribilis. Elle contraint Sanoline à tirer la prise à la fin du mois d’août pour une partie de son activité face à une forte baisse de son activité. Yohan s’accroche et y croit. Mais les dommages collatéraux sont inévitables. Il est 9h ce lundi matin. Yohan Bugnon apprend qu’il doit licencier des dizaines de collaborateurs par Zoom ou par téléphone: «J’ai dû le faire, mais je ne le ferai plus jamais. On ne m’a pas appris à diriger dans une telle crise. C’est d’ailleurs cet accompagnement qui fait défaut dans la fonction. J’ai donc licencié les collaborateurs, mais je l’ai fait à l’instinct; avec empathie, malgré le contexte et les conditions.»

Yohan Bugnon ignore encore qu’il se retrouvera dans la même position quelques mois plus tard. Paradoxalement, la tempête lui ouvre les yeux. L’hyperactif  morgien, engagé deux ans auparavant pour «faire bouger les choses» quitte l’entreprise, mais pas la fonction. A 35 ans maintenant, il est l’heureux directeur commercial au sein du groupe CWS, qui fournit des solutions d’hygiène pour les entreprises. Quant à Yohan Bugnon et Sanoline SA, ils sont «restés en très bons termes. Ce sont mêmes devenus nos clients».

La série de podcasts «L’écho des CEO» vous est présentée par le Service juridique du Centre Patronal.