Avant de lancer son chantier contre le harcèlement, le mobbing et la discrimination au travail, Ingrid Vernez a commencé par établir une cartographie des risques et résumé en cinq points le cadre général de sa politique de santé, sécurité et qualité de vie au travail pour la Fondation Asile des aveugles: le respect des prescriptions légales; l’information et la formation des collaborateurs; la réduction des risques liés à la santé et à la sécurité dans un environnement hospitalier; la diminution de l’absentéisme; l’amélioration des conditions de travail.

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«Mon premier défi a surtout consisté à faire de cette thématique une préoccupation de chacun des 657 collaborateurs de l’entreprise», raconte cette psychologue du travail et des organisations passée par les RH des Transports publics lausannois (TL) et  ceux du groupe de presse Ringier Axel Springer Suisse Romande (éditeur de PME, ndlr). Avec, très vite, une attention particulière accordée aux risques psychosociaux et au spectre du harcèlement et du mobbing. «Le monde médical reste très hiérarchisé et, à bien des égards, figé. La pandémie, avec des vues tranchées sur les différentes mesures de protection des collaborateurs et l’épuisement du personnel, n’a fait qu’accentuer cet état de fait.»

Avec sa campagne «Ça, c’est non» et la publication d’une brochure très accessible sur tous les types d’agressions au travail, Ingrid Vernez a voulu prévenir plutôt que guérir. «Ce choix stratégique n’était pas motivé par une multiplication des cas de harcèlement ou de discrimination au sein de l’institution, précise-t-elle. Mais, désormais, chacun(e) sait qu’il y a une possibilité de recours. Ce qui a pour vertu de tranquilliser les collaborateurs(trices).» 

Et de repérer de manière précoce d’éventuels problèmes de management. «Lorsqu’un conflit larvé entre deux personnes a dégénéré, insiste-t-elle, il est en général trop tard et il est difficile d’agir pour réparer les dégâts.»


Rétablir la communication avec les collaborateurs 

2. Fabian Hintz, directeur de la PME sierroise DPE Electrotechnique employant quelque 24 collaborateurs a fait appel à une psychologue du travail.

Fabian Hintz, directeur de DPE Electrotechnique  

© Darrin Vanselow

On ne va pas mettre l’entier de la faute sur les bureaux en open space. Mais, rétrospectivement, le déménagement de DPE Electrotechnique dans de nouveaux locaux pourtant modernes et lumineux a joué un rôle de déclencheur. «Nous avions grandi  rapidement sans nous doter d’une nouvelle organisation pour canaliser cette croissance, explique Fabian Hintz, directeur de cette PME de 24 personnes installée dans l’Ecoparc de Daval, à Sierre. Du coup, les anciennes tensions provoquées par une surcharge de travail, une communication peu claire sur les projets des uns et des autres ajoutées aux nuisances sonores, propres au nouvel espace de travail, se sont transformées en une crise soudain visible par tous, mais difficile à verbaliser.»

Le recours au regard extérieur de Cathrine Mathey, psychologue du  travail de l’entreprise Expertise RH, va se révéler déterminant. Pour mieux comprendre la situation, la spécialiste s’appuie d’emblée sur l’outil développé par Promotion Santé Suisse, le questionnaire Job Stress Analysis. «Cette première approche quantitative a été bien perçue par une équipe principalement constituée d’ingénieurs», observe celle qui se positionne comme une facilitatrice entre la direction et les divers corps de métier de l’entreprise. 

Cathrine Mathey va ensuite proposer une série de mesures plutôt techniques. Entre autres, le développement d’un outil informatique permettant une meilleure planification des projets. «Plusieurs des collaborateurs éprouvaient jusque-là des difficultés à séparer vie professionnelle et vie privée.  Le travail que nous avons fait ensemble leur a permis de reprendre en main la gestion de leur temps», observe la psychologue, qui continue d’accompagner l’entreprise. Des règles ont été établies pour une coexistence plus sereine (et silencieuse) dans  l’espace commun. L’histoire de DPE Electrotechnique se termine bien. Il suffisait de se lancer. 


L’importance d’un soutien au plus haut niveau

3. Nathalie Cavin, directrice RH d'IMI Hydronic Engineering International, met en œuvre une politique qui vise à garantir le bien-être physique et mental de plusieurs milliers de salariés.

Nathalie Cavin, directrice RH chez IMI Hydronic Engineering International

© Darrin Vanselow

«La pandémie a provoqué une prise de conscience renouvelée de l’importance de la santé de nos collaborateurs et de mettre l’humain au centre», souligne Nathalie Cavin, directrice des ressources humaines d’IMI Hydronic Engineering International. La voilà donc, depuis l’an passé, coiffée d’une deuxième casquette, celle de «Well being Project Leader» de la Division du groupe IMI Plc. Mission: la mise en œuvre d’une politique qui garantisse le bien-être physique et mental des 50 collaborateurs du siège, celui des 150 employés de l’usine du groupe près de Bâle, mais aussi celle des quelque 2000 salariés de ses usines et 34 sites de vente ailleurs en Europe et aux Etats-Unis.

Le slogan de l’entreprise: «Une ingénierie de pointe au service d’un monde meilleur». Ses produits: des valves, des équipements de traitement et de distribution de l’eau, des vases d’expansion… «La sécurité est depuis toujours une priorité absolue», explique Nathalie Cavin.  Comme d’ailleurs le respect des critères environnementaux. Il s’agit maintenant d’aligner ces valeurs sur une stratégie holistique de la GSE. «J’ai commencé par analyser ce qui se fait sur le marché avant de proposer une boîte à outils sur quatre axes: le bien-être physique de nos collaborateurs; leur santé mentale et psychique; une offre de formation en matière de résilience, de gestion de la pression et du stress numérique… Et un support externe disponible en cas de problèmes liés au travail, mais aussi à la vie privée (divorce, ennuis financiers, décès d’un proche…).»

Certaines de ses mesures sont d’ailleurs approuvées et soutenues par le Groupe Mutuel dans le cadre d’un contrat accident et perte de gain. «Mettons que j’organise un atelier de formation en résilience coûtant 20 000 francs, notre assureur en couvrira un tiers environ.» Une stratégie adoubée par le CEO du groupe. Les spécialistes sont catégoriques: pour être efficaces, les mesures de GSE doivent pouvoir compter sur un soutien au plus haut niveau. 

Weisses Viereck
Alain Jeannet