«En trente ans de métier, je n’ai jamais soumissionné pour obtenir un mandat, ni fait de concours et encore moins d’offres spontanées. Rien. Zéro. C’est génial, non? Tout est arrivé par bouche à oreille. Incroyable! Quand je regarde mon parcours et celui de ma société, Media Impact, je me pince encore pour y croire. Il faut dire que les choses avaient plutôt mal commencé. Alors que je me destinais à l’enseignement, mes trois semestres d’uni effectués après mon diplôme de l’Ecole normale ont suffi à me convaincre que ce job n’était pas fait pour moi. A 64 ans, je suis donc toujours un prof qui n’a jamais enseigné.

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J’avais 21 ans et je cherchais ma voie. La télévision suisse m’en a offert une: collaborateur de production, à Berne, à la défunte Télédiffusion. J’y ai passé trois ans, à réaliser chaque semaine un sujet de mon choix. Un tremplin pour entrer à ce qu’on appelait encore la Radio suisse romande. Couleur 3, précisément. En parallèle, j’arrondissais mes fins de mois comme DJ dans des stations de ski. Je galérais mais je m’amusais. Puis, un jour, le groupe Edipresse, éditeur du Matin et de 24 heures, a créé une radio, Radio L. C’est là que j’ai fait mon stage de journaliste.

Dès lors, tout s’est enchaîné comme par magie. Un jour que je couvrais le rallye automobile des Alpes vaudoises, je fais la connaissance du CEO de Mazda Suisse, sur le bord de la route, après son abandon. Il me dit être à la recherche d’un attaché de presse. Bingo! Sauf que je me suis fait virer après six mois. Heureusement, j’avais gardé quelques piges à Radio L, où Bertrand Piccard est venu frapper à la porte. 1986: Bertrand faisait de l’ULM, interdit en Suisse à cette époque. Il m’a dit: «Je vais faire un vol Brigue-Milan. On enregistre le sujet, mais tu en parles seulement après.» J’ai accepté, bien sûr. On a sympathisé. Et on s’est retrouvés quelques années plus tard, alors que j’avais créé ma société de relations médias.

Ce jour-là, Bertrand m’a parlé de son projet de tour du monde en ballon, Breitling Orbiter, parrainé par la marque du même nom. Il m’a proposé le mandat. J’ai commencé par une conférence de presse, à Cointrin, où il y avait foule. Cela a convaincu Breitling d’y aller à fond. Avec moi. Pendant vingt et un jours, je me suis retrouvé à la tête d’une équipe de 18 personnes, qui balançait 780 fax par jour en trois langues à travers le monde, sept jours sur sept et vingt-quatre heures sur vingt-quatre. J’étais le seul à être tous les jours en contact avec Bertrand. Les médias de toute la planète me courtisaient. Un truc de fou. Mon jackpot à moi.

Une vitrine inespérée pour Media Impact, avec comme effet pervers de faire penser aux gens que nous étions hors de prix, ce qui était faux bien sûr, et comme avantage de nous positionner dans le monde de l’aviation. Conséquence, les mandats sont tombés du ciel, si je puis dire. Sion Air Show, Super Constellation, Breitling Jet Team, Yves Rossy alias Jetman, Solar Impulse. Mais pas que. Le Grand Raid depuis vingt-deux ans, Green Motion, le Salon des inventions depuis trente ans, Omega et, l’une de mes grandes fiertés, l’illumination des montagnes valaisannes à l’occasion du bicentenaire du canton, en 2015. Deux milliards de vues dans les TV, sans compter les réseaux. Quel bonheur! Et des retombées qui me font oublier que je suis à une encablure de l’âge légal de la retraite. Quand on aime, on ne compte pas… les années, c’est bien connu.

La passion est toujours là. Dans tous les sens du terme, d’ailleurs. Aujourd’hui, j’œuvre à promouvoir un concert s’intitulant La passion, en référence à la Passion du Christ, qui réunira 55 musiciens et 100 chanteuses, dans les cathédrales de Genève, de Lausanne et de Saint-Maurice, en mai prochain. J’ai écrit au pape François pour l’informer et demander son soutien, qui sait. Son secrétaire a accusé réception. Un bon début. Après avoir tant fréquenté les cieux dans ma carrière, je me suis dit que je pouvais encore me rapprocher un peu plus du ciel, qui sait…»

Christian Rappaz, journaliste
Christian Rappaz