Le budget américain se trouve dans une situation difficile. Le déficit pour la seule année 2024 s'élève à 1 830 milliards de dollars, et pour l'année en cours, les dépenses ont déjà dépassé les recettes de plus de 1 600 milliards de dollars. À cet égard, les recettes provenant des droits de douane introduits par le président Trump sont insignifiantes.
Et pourtant, avec 13,4 milliards de dollars, la Suisse figure parmi les principales sources de recettes douanières du fisc américain depuis l'introduction des droits de douane en août. C'est ce qu'ont calculé les économistes de Global Trade Alerts (GTA), une organisation qui analyse en permanence le commerce mondial. Leur calcul repose sur l'hypothèse que l'année commerciale 2024 se répète, mais avec les nouveaux droits de douane.
La Suisse deviendrait ainsi une source de revenus plus importante pour les États-Unis que la France (8,1 milliards) et l'Italie (10,4 milliards), qui sont respectivement la deuxième et la troisième économie de l'Union européenne et dont le produit intérieur brut est plus de deux fois supérieur à celui de la Suisse.
L'Allemagne s'en sort mieux
L'Allemagne rapporte certes aux États-Unis des recettes douanières nettement plus élevées que la Suisse (25 milliards de dollars), mais ces valeurs absolues doivent être relativisées en raison de la taille des deux pays. La performance économique de l'Allemagne est cinq fois supérieure à celle de la Suisse. Le montant qui revient aux États-Unis en provenance de la Suisse semble donc élevé.
Cette situation peu réjouissante du point de vue helvétique s'explique d'une part par le volume commercial relativement élevé de la Suisse avec les États-Unis. Il se monte à 63 milliards de dollars, contre 159 milliards pour l'Allemagne, 59 milliards pour la France et 76 milliards pour l'Italie.
D'autre part, la situation s'explique par les différences entre les droits de douane. La Suisse a été imposée à un taux de 39%, tandis que les États membres de l'UE que sont l'Allemagne, la France et l'Italie ont été soumis à des droits de douane de 15%. Mais cela ne représente qu'une partie du tableau. En effet, le système douanier est complexe et comporte des exceptions. Les produits pharmaceutiques, par exemple, en sont pour l'instant exclus.
La charge douanière effective est également élevée
C'est pourquoi les taux douaniers effectifs pondérés s'écartent des taux annoncés, et les experts de Global Trade Alert ont également publié une analyse à ce sujet. Concrètement, la Suisse est effectivement taxée à 21,3%, l'Allemagne à 15,7%, l'Italie à 13,7% et la France à 13,6%. Dans cette mesure, les produits suisses ne sont pas aussi fortement touchés que le laisse supposer le taux de 39%. Mais par rapport à un commerce sans droits de douane et par rapport aux produits des pays européens voisins, ils sont de toute façon plus fortement affectés.
Cette impression est renforcée lorsque l'on s'interroge sur l'impact des droits de douane sur la compétitivité d'un pays. Pour y répondre, on peut comparer la charge douanière d'un pays avec les taux de ses concurrents directs et les mettre en relation. L'analyse GTA parle de «Relative Trump Tariff Advantage», l'avantage relatif des droits de douane de Trump.
Dans le cas de la Suisse, il s'agit d'un désavantage. La valeur correspondante est de moins 12,1%. Il s'agit du désavantage concurrentiel de la Suisse en termes de prix par rapport à ses concurrents, ce qui signifie que l'accès des entreprises suisses au marché américain s'est détérioré en conséquence.
Les voisins ont un avantage relatif
Il en va de même pour la Chine, par exemple, qui, selon les calculs, subit un désavantage de 29%. À l'inverse, l'Allemagne (+1,4%), la France (+0,5%) et l'Italie (+2,4%) bénéficient d'un avantage relatif. Il est important de noter qu'il s'agit ici d'une comparaison entre les pays et qu'il ne s'agit pas de savoir si les États-Unis ont donné un avantage absolu à l'Allemagne ou à l'Italie, par exemple. Les avantages de ces pays résultent de la structure globale des droits de douane.
Cette situation instantanée ne devrait toutefois pas être gravée dans le marbre. Les ajustements de politique approuvés par le président américain ou les réactions des entreprises à la nouvelle situation pourraient faire évoluer la donne. Du point de vue de la Suisse, la question de savoir si, quand et dans quelle mesure des droits de douane seront appliqués aux produits pharmaceutiques est également importante.
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Cet article est une adaptation d'une publication parue dans Cash.
Le président américain a certes introduit des droits de douane de 39% à l'encontre de la Suisse. Mais les différentes régions du pays sont touchées à des degrés divers, en fonction de la dépendance de leur économie régionale à l'égard des exportations vers les États-Unis.
UBS a publié une étude à ce sujet. Selon celle-ci, les conséquences économiques négatives des droits de douane élevés devraient être «concentrées au niveau régional», comme l'écrit l'économiste en chef Daniel Kalt.
Les régions les plus touchées sont la Vallée De Joux, la Chaux-de-Fonds et le Val-de-Travers, qui affichent la plus forte proportion d'emplois industriels en Suisse et exportent également de manière disproportionnée vers les États-Unis. Selon Daniel Kalt, les régions du Fricktal (nord-ouest), de Neuchâtel, de Nidwald et de Bâle-Ville sont également très dépendantes des exportations vers les États-Unis.
Grenchen, Rheintal, Werdenberg, Schaffhouse, Prättigau et le Jura sont également fortement touchés en raison de l'importance de l'industrie pour l'économie locale, même si leur part des exportations vers les États-Unis est moins importante.
Il est possible de prendre des contre-mesures, par exemple en recourant au chômage partiel. Celui-ci vise à éviter autant que possible les pertes d'emplois. Cette option a surtout été utilisée pendant la crise du coronavirus, lorsque des centaines de milliers de personnes, voire plus d'un million au plus fort de la crise, ont été mises au chômage partiel.